Verikalpa
Tunturihauta
Genre Folk Metal
Pays Finlande
Label Scarlet Records
Date de sortie 21/01/2022

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Les vidéos publicitaires de YouTube, aussi agaçantes puissent-elles être, réservent parfois quelques bonnes surprises. Verikalpa est de celles-ci. C’est en effet par ce biais que de nombreux internautes, incluant l’auteure de cette chronique, revendiquent avoir connu en 2020 le groupe finlandais qui sortait alors son deuxième album, Tuoppitanssi, par le biais de l’excellent premier extrait Naulattujen vaellus. Il découvrait alors un folk metal aux accents assez sombres et brutaux, accompagnant des textes mettant à l’honneur la langue maternelle des six musiciens. Deux ans plus tard, désormais installé plus confortablement dans le paysage musical du metal finlandais et toujours épaulé par son label Scarlet Records, Verikalpa présente à son — nouveau — public un troisième album, Tunturihauta. Dans la continuité directe de ses deux prédécesseurs, ce nouvel opus ancre le groupe dans le style qui le caractérise.

Ce style qui constitue la signature de Verikalpa depuis ses débuts, trouve ses racines dans une agressivité qui prend aux tympans et aux tripes dès les premières notes de n’importe lequel de ses morceaux. Tunturihauta, à ce titre, ne déroge pas à cette règle. Bien au contraire, il la renforce et le démontre dès la première seconde du titre d’ouverture, Verikauhu, qui accueille par un hurlement a cappella sorti tout droit des tripes de Jani Ikonen. Ce cri puissant ouvre la voie à des compositions qui le sont tout autant. Tout au long des quarante-six minutes d’écoute, se succèdent couplets au tempo rapide, portés par des riffs qui montent d’un cran dans l’aspect black metal, et refrains un peu moins rapides sur lesquels se pose un chant plus articulé. Le tout, sur fond d’une batterie auquel le mixage accorde une puissance indispensable. Jari Huttunen, très en forme, s’en donne à cœur joie sur les fûts, jusqu’à atteindre un rythme mitraillant sur Riitti ou Hurmos. Le même traitement est réservé à la basse de Sami Knuutinen, omniprésente et au son bien lourd, presque doom. Point de place au relâchement, sauf peut-être sur le morceau éponyme et son voisin Jotunimmalja, plus lents et dont les riffs prennent quelques accents death metal.

Néanmoins, et toujours à l’image des deux premiers albums, le cœur du style Verikalpa est et reste le synthétiseur reproduisant, dans une illusion parfaite, un accordéon plus vrai que nature. Bien plus que les guitares ou la section rythmique, et encore plus infatigable que ces dernières, il est le pilier qui porte l’ensemble des morceaux, grâce à des mélodies aussi entraînantes qu’entêtantes. De la même façon, une oreille attentive notera que le chant de Jari Huttunen s’appuie principalement sur le rythme de cet accordéon digital, plus que sur autre chose. S’il venait à être retiré de Tunturihauta, disparaîtrait avec lui le côté dansant, particulièrement présent sur des titres tels le single Taisto et dont l’album tire son charme — ainsi que sa cohérence.

À ce propos, la constance dans le rythme comme dans le style pourrait bien entraîner chez certains un sentiment de monotonie. Cependant, bien que confortablement installé dans la zone qui lui convient, Verikalpa se permet de temps à autre de dévier de son fil conducteur. Par exemple, lorsque les claviers abandonnent leurs sonorités accordéoniques, au profit d’autres plus éthérées le temps, soit de quelques passages, notamment l’intro de Raivokansa, soit d’une bonne partie de Talven varjot. Cette ultime piste, par ailleurs, est celle qui se permet le plus de choses en matière d’exploitation d’éléments musicaux. Après un début sombre et austère, porté par la basse, le morceau évolue vers une deuxième moitié à laquelle l’inclusion de chœurs ajoute un aspect épique. Black metal et metal progressif se joignent ainsi dans un mélange étonnant, mais dosé assez intelligemment pour ne pas choquer. Autre élément qui pourra prêter à sourire, les lignes de chant clair, auxquelles Jari Huttunen se laisse aller vers la fin du single Rautanen Herra (note : Herra est un nom propre), au travers duquel le groupe fait d’ailleurs montre de son sens de l’humour, qui ne sont pas sans rappeler Korpiklaani…

Korpiklaani en plus bourrin, ou Moonsorrow en plus rapide, ou encore fils de Fintroll… tels sont quelques-uns des termes susceptibles de venir en tête lors d’une première écoute. Verikalpa est un groupe marqué par les influences, indéniablement, ce que Tunturihauta ne fait que confirmer et ne manquera pas de susciter des comparaisons en tous genres et pas toujours favorables, aussi indéniablement. Cependant, à la décharge du groupe, se démarquer dans le vaste milieu du folk metal de Finlande n’est pas chose aisée ; à ce titre, emprunter quelques astuces à d’illustres aînés n’a rien de condamnable en soi, bien au contraire. Dans tous les cas, bien qu’encore relativement jeune, Verikalpa avance avec régularité, aussi bien dans le rythme des sorties que dans son style folk tout à la fois dansant et brut. Gageons qu’avec le temps et un peu d’expérimentation, le groupe saura faire évoluer ce style et affirmer encore plus sa personnalité…