Lieu Dinkelsbühl (Allemagne)
Date du 17 au 20 août 2022
Chroniqueur Ségolène Cugnod
Photographe François Feleki
https://www.summer-breeze.de/en
Groupes (17 août) Pallbearer, Exodus, Testament, Paradise Lost, Our Promise, 1914, Die Apokalyptischen Reiter

Vingt-cinq ans, un quart de siècle, voilà qui marque une étape dans la vie humaine — et celle d’un festival. Cette année, après deux éditions annulées pour cause de pandémie, les organisateurs du Summer Breeze comptent bien fêter cet anniversaire et ce retour dignement. Pour cela, ils ont prévu une affiche rassemblant pas moins de 133 groupes, des vétérans de longue date aux groupes émergents, et invitent les spectateurs de tous horizons à les rejoindre au point de rendez-vous habituel à l’aérodrome de Dinkelsbühl. Pour Metal Alliance Mag, il était hors de question de manquer cela, et c’est ainsi qu’après un trajet de quelques heures et une escale à Lindau, François Feleki et moi-même arrivons juste à temps pour la première journée, celle du 17 août.

En fait de journée, celle-ci démarre pour nous en fin d’après-midi avec Pallbearer, quatuor américain de doom metal et première découverte de la T-Stage. La performance du groupe, tout comme sa musique, se veut sobre et sans artifices, sans artifices ni même de décor de scène. Sobre, sombre aussi, aux allures d’un Black Sabbath des premières heures, au rythme posé et ponctué de moments de communication minimaliste que le frontman Brett Campbell dispense derrière ses lunettes noires… qu’il envoie rapidement valser. Pallbearer nous offre en tout cas une ouverture de festival dans le calme, loin d’être désagréable en pensant au chaos à venir.

Pallbearer

Exodus est le prochain groupe à fouler la T-Stage, venu une énième fois administrer une leçon de thrash metal à la mode américaine. Leçon qui commence comme il se doit, c’est-à-dire par un passage à tabac en règle sur The Beatings Will Continue, qui fait déjà mordre la poussière à plus d’un festivalier ! Entre deux morceaux, Steve Souza ne cache pas le bonheur que partagent ses confrères et lui-même d’être de retour sur scène après trois ans de repos forcé, ainsi que quelques déconvenues qui auraient pu mener à une annulation. Le groupe joue en effet exceptionnellement sans son guitariste Lee Altus, retenu aux États-Unis par une urgence familiale, qui est remplacé par Brandon Ellis de The Black Dahlia Murder. En dépit des singulières différences de style et d’âge, ce dernier se les approprie et fait montre d’une belle complémentarité avec l’historique Gary Holt. Impressionnant, tout comme le set ! Exodus et ses fans rendent hommage à la carrière du groupe, ainsi qu’au défunt Trevor Strnad, unis par le sang.

Exodus

Là où va Exodus, Testament suit. Qui les suit à son tour, s’assure de recevoir d’affilée deux leçons de thrash à la sauce US… Bien entendu, l’enchaînement des deux prestations d’aujourd’hui ne fait pas exception. Très en forme, les cinq thrasheux enchaînent anciens et récents morceaux sans jamais s’accorder plus de quelques secondes de répit entre chaque, et lorsqu’ils le font, ce n’est que pour mieux exprimer leur gratitude à leurs fidèles fans allemands — entre autres ! Pour un peu, Chuck Billy en aurait presque l’air moins menaçant dans ses expressions faciales si caractéristiques… Dans tous les cas, Testament déclare la Troisième guerre mondiale à l’Allemagne, qui se déclenche dans la fosse au fil d’un set au rythme imperturbable. Une dizaine de titres et à peu près autant d’acclamations après le début de ce dernier, le groupe invite Steve Souza à revenir sur scène après avoir assuré avec Exodus pour un duo avec Chuck Billy sur Alone in the Dark. Un bien bel hommage à une amitié de longue date, voilà qui conclut à merveille le set…

Testament

En attendant le passage de Paradise Lost, nous en profitons pour faire un tour du côté de la Wera Tool Rebel Stage et y découvrir Our Promise. À cinq sur un espace assez restreint, les musiciens ne sont pas à l’abri de se marcher dessus… qu’à cela ne tienne, ils n’en font que peu de cas et profitent à fond des quarante minutes qui leur sont accordées pour se lâcher. Leur style le veut bien, un metalcore à l’écriture solide, moderne et dynamique dans son état d’esprit, et porté par deux voix qui se complètent bien. À noter que cette complémentarité s’illustre même dans le dress code des deux vocalistes, l’un portant un haut noir associé à un short blanc et l’autre inversement…

Dans l’ombre de la nuit, Paradise Lost fait son entrée sur la T-Stage, première tête d’affiche de la soirée sur cette scène. Face à une des pointes du triangle des « Peaceville Three », plus de terrain pour l’agitation, à la place de laquelle s’imposent solennité et respect. Forts d’une union indissoluble, les quatre Britanniques, accompagnés cette année de l’Italien Guido Motanarini à la batterie, font valoir leur expertise en matière de musique atmosphérique avec le même entrain et le petit supplément d’âme qui les accompagnent depuis maintenant presque trente-cinq ans. L’ambiance instaurée est à la fois douce et sombre, à l’image du mélange des genres entre doom/death metal et rock gothique. Cette dualité se retranscrit dans l’éclairage bicolore, dont les teintes varient d’un morceau à l’autre. Entre noirceur et onirisme, tout fait mouche dans la prestation de Paradise Lost, et je n’ai nulle peine à imaginer l’émotion ressentie par certains spectateurs.

Paradise Lost

Cependant, l’heure tourne et je dois partir avant la fin du set pour rejoindre le public de 1914 devant la Ficken Party Stage. Le public en question se retrouve bien vite agglutiné dans un espace assez restreint ; preuve, s’il en est, que si le sujet de la guerre en Ukraine divise dans les hautes sphères du pouvoir, il rassemble le bas peuple. Au vu de l’investissement que met le groupe dans la transmission de son message, nous ne sommes sûrement pas trop nombreux pour le recevoir ! Les morceaux sont épiques, furieux et d’une incroyable richesse dans leur savant mélange black/death, aidés par l’interprétation de musiciens immergés dans leur univers martial. Après l’hypothétique Troisième lancée par Testament plus tôt, c’est la Première guerre mondiale qui se recrée devant la Ficken Party Stage, dont je fais des frais en recevant des combattants dans le dos… L’excitation générale est à son comble lorsque, cerise sur l’AK47, Dmytro Kumar annonce un invité de marque : Noise de Kanonenfieber, venu en personne manifester son soutien à la cause au travers d’un duo sur Mitt Gott for König und Vaterland. Pour les fans des deux groupes, ce duo est un rêve qui devient réalité, en plus de renforcer l’attente de la future prestation de Kanonenfieber au Summer Breeze 2023…

1914

De retour vers la Main Stage aux environs de minuit et demi, je profite des derniers morceaux du show de Korpiklaani ; en habituée du groupe finlandais, je ne suis pas surprise de le voir encore une fois mettre en avant son aspect festif sur scène, porté par un violon inébranlable. Après un peu d’attente, vers 1 heure du matin, c’est toujours dans le thème folk que se poursuit — et, pour nous, s’achève — cette première soirée de Summer Breeze, avec Die Apokalyptischen Reiter. Du folk bien allemand, bien dansant et bien dynamique, que demander de plus avant d’aller se reposer ?

Groupes (18 août) Evile, Darkest Hour, Conjurer, Ghøstkid, Mr Hurley & die Pulveraffen, Beast in Black, Necrotted, Death Angel, Cannibal Corpse, Arch Enemy, Dagoba, Der Weg einer Freheit

Après une première journée principalement passée devant la T-Stage, cette deuxième journée de Summer Breeze nous voit mettre la Main Stage à l’honneur, et cela commence de bonne heure avec les Britanniques d’Evile. Devant un public encore clairsemé de début d’après-midi, les Anglais partagent avec ce dernier leur thrash metal bien ficelé au jeu de cordes très propre ainsi que leur enthousiasme, entre autres à grand renfort de grimaces de la part du batteur Ben Carter. Ceci, en dépit d’un son un peu faible au niveau de la guitare du frontman, Oliver « Ol » Drake. D’humeur blagueuse, ce dernier ajoute une touche d’humour à l’ensemble en lançant quelques plaisanteries sur son allemand approximatif… À tout ceci, les festivaliers se montrent réceptifs, improvisant un circle pit pour les uns, répétant de bon cœur « Ici habe Durchfall » ( « j’ai la chiasse » en allemand, ndlr…), apparemment une des seules phrases dans la langue de Goethe que connaît le frontman…

Evile

Bien que n’ayant pas inclus en avance Darkest Hour dans nos running orders, nous avons néanmoins la curiosité de voir ce que vaut sur scène ce groupe américain. Pour nous, bien que peu adeptes du hardcore et de ses styles dérivés, la surprise est bonne. Les quatre membres du groupe portent leur show par leur maîtrise technique et leur motivation ; tous occupent l’espace scénique en bougeant beaucoup et dégagent une belle énergie collective. Au niveau du style, le mélange entre metalcore et death mélodique, s’il reste assez commun, est agréable à l’oreille. D’un point de vue vocal, le chant de John Henry, bien qu’agressif comme il se doit, a le mérite de ne pas être trop braillard et hystérique. En outre, je me dois aussi de mentionner le sens de l’esthétique dont fait montre Darkest Hour, avec son magnifique visuel en décor de fond ! Accrocheur sur tous les plans.

Par la suite, alors que Ghøstkid s’apprête à prendre place sur la Main Stage, je ne peux résister à l’appel du metal boueux et me dirige alors vers la Wera Tool Rebel Stage pour la performance de Conjurer. Ici, pas le temps ni l’envie de faire dans la dentelle pour les musiciens, qui offrent au public une prestation dépouillée aussi bien sur le plan musical que sur celui de la mise en scène et démontrent ainsi une sincère fidélité aux valeurs du sludge. Conjurer conjure l’esprit du genre au travers de la dualité des voix que partagent Dan Nightingale et Brady Deeprose, l’une grave et l’autre aiguë, et des riffs un rien planants, toujours écorchés, servis par des musiciens habités par ledit esprit. Le bassiste Conor Marshall, en particulier, se montre si habité qu’il descend de scène sur le dernier morceau pour rejoindre le public, lequel s’est épuisé en circle pits sous l’effet de la conjuration…

Le set de Conjurer n’ayant duré qu’une demi-heure, je reviens à temps devant la Main Stage pour les vingt dernières minutes de celui de Ghøstkid. Le corps entièrement caché sous des vêtements noirs, les yeux sous des lentilles recouvrantes de la même couleur ressortant sur des visages maquillés de blanc, tout dans le look de seigneurs vampires qu’adoptent les musiciens semble évoquer un univers d’inspiration horrifique… Malheureusement, leur post-hardcore mêlé de trap et de neo metal semble un peu trop lisse et uniformisé par rapport à l’ambiance sale et sombre qu’appelle cette esthétique plus proche de celle du black metal. En outre, si je ne remets pas en cause la présence scénique du leader Sebastian Biesler, ses choix capillaires posent question… Sérieusement, pourquoi des couettes ?

Ghøstkid

La programmation de la Main Stage vire ensuite de bord au sens littéral du terme avec l’arrivée de Mr Hurley & die Pulveraffen ! Quasi-systématiquement présente à l’affiche du Summer Breeze depuis de nombreuses années, c’est pourtant une première pour nous qui n’avions jusque-là jamais saisi l’occasion de voir la fratrie adepte du folk dansant sur scène. Les trois frères et la sœur amènent esprit festif et esthétique a la Monkey Island sur les terres de Bavière, à la grande joie d’un public qui leur réserve un accueil en fanfare… dans tous les sens du terme ! Des soucis techniques provoquent une coupure des micros sur le deuxième morceau, ce qui n’entache que peu la performance, et en rien la bonne humeur générale. Le temps de trois courts quarts d’heure, Mr Hurley & die Pulveraffen transforme le Summer Breeze en grande fête familiale, de quoi retrouver la forme pour la suite !

Mr Hurley & die Pulveraffen

Cela faisait un moment que j’attendais une bonne occasion de voir Beast in Black sur scène ; la voici qui se présente aujourd’hui. Décoration à l’image de Dark Connection en guise de décor, le groupe compte bien faire valoir ce dernier album — et ce, pour une fois, sans la présence de ses éternels rivaux de Battle Beast pour lui faire concurrence. De la guitare vert fluo avec écrit dessus « tsonk » de Kasperi Heikkinen à la basse en forme de petit démon de Máté Molnár, auxquelles ajouter un Anton Kabanen qui abuse sur la veste à clous et les lunettes de savant fou de Yannis Papadopoulos, tous les membres jouent à fond la carte du kitsch, raccord avec son heavy/power metal à la sauce EBM et Eurodance des 80’s. Bon goût ou mauvais goût, chacun est juge ; dans tous les cas, le fun est bel et bien là, sur scène comme dans l’audience. Si vocalistes et guitaristes semblent faire le concours de celui qui chante le plus fort, celui qui s’éclate le plus est pourtant Atte Palokangas, dont les grands sourires enfantins à chaque coup de baguette donnent la même banane. Le son est parfois un peu faible au niveau du chant principal, cependant le voyage rétro-futuriste se passe sans incident ni paradoxe temporel. The beast is back, indeed.

Beast in Black

Tandis que Finntroll se charge de faire danser le public de la Main Stage, nous préférons nous laisser tenter par le metal extrême de Necrotted sur la Wera Tool Rebel Stage. Extrême, le terme n’est pas piqué des hannetons au vu de ce que le groupe a à offrir ! Death et thrash, accompagnés d’une touche de deathcore sur tel passage, de black sur un autre, se réunissent dans une orgie sanglante entre les mains des cinq Allemands. Venus d’Abstgmünd, ancienne ville hôte du Summer Breeze, ils n’ont certes pas fait beaucoup de chemin pour venir jusqu’ici, mais défendent bec et ongles — ou plutôt crocs et griffes — leurs morceaux, particulièrement leur nouveau single dont la sortie est programmée au 26 août, Sow Sorrow for Victory. Fabian Fink, pieds nus et couvert de tatouages, mène le jeu avec hargne, soutenu par des camarades qui n’en manquent pas non plus. À la fin du set, le public a même la surprise d’assister à une demande en mariage en direct sur la scène… Qui a dit que le metal extrême ne pouvait pas être romantique ?

Necrotted

Quelques mois après un mémorable passage à Martigny, le moment est idéal pour refaire un petit coucou à Death Angel sur la T-Stage. Sous un soleil toujours présent, le groupe apporte sa propre lumière et chaleur à des spectateurs tout sourire à l’idée des retrouvailles avec les grands du thrash américain. Sans surprise, ces derniers prouvent une fois de plus qu’ils peuvent tenir la dragée haute au Big Four grâce à leur technicité irréprochable et leur énergie positive et communicative. Il fait vraiment plaisir de voir les cinq musiciens si complices sur scène. Incapables de rester en place une seconde, tous consacrent leur temps de set à échanger regards et dialogues musicaux en tous genres, entre eux comme avec le public. Death Angel vit le moment à fond et retranscrit à chaque instant de son show sa technicité tout comme son bonheur d’être présent aux côtés de ses fans, qui le lui rendent bien.

Death Angel

Cannibal Corpse succède, encore un cran au-dessus en matière de bourrinitude, devant des dizaines d’aficionados prêts à l’accueillir et l’encourager avec les honneurs. Un accueil mérité au vu de la rigueur et du professionnalisme dont font montre les experts américains du death metal, dont l’expérience se voit et se ressent à chaque instant. Aucun ne laisse place à l’erreur, dans l’exécution comme dans le style ; en témoigne entre autres le style capillaire de Corpsegrinder, tout en rideaux devant la figure en mode « fantôme »…

Cannibal Corpse

Je ne reste cependant que le temps d’une demi-heure, histoire de prendre place avec un peu d’avance face à la Main Stage pour Arch Enemy. Comment pourrais-je me permettre l’outrecuidance de manquer qui fait désormais figure de tête d’affiche incontournable une seconde fois ? Sous la lumière de dizaines de stroboscopes, la pochette de l’album fraîchement sorti Deceivers en guise de décor, le groupe attaque de front avec The World Is Yours suivi du quasi-éponyme Deceiver, Deceiver ; belle entrée en matière s’il en est. Bien que la tournée des festivals d’été touche à sa fin, Michael Amott et sa bande sont bien loin d’être rincés et le prouvent en mettant le feu au Summer Breeze sur lequel tombent des gouttes de pluie. Mais qui sera surpris de l’apprendre ? La setlist non plus ne surprend pas, principalement composée de morceaux récents en plus des extraits de Deceivers ; bien que le chant clair d’Alissa White-Gluz fasse plaisir à entendre sur Handshake with Hell. La surprise est peut-être ce qui manque, finalement, à un Arch Enemy qui possède l’énergie et le sens du riff catchy propre aux grands…

De retour du côté de la Wera Tool Rebel Stage, c’est un groupe français qui en foule les planches en la personne de Dagoba. En pleine promotion de son dernier opus By Night, les quatre musiciens, très en forme malgré les aléas d’un long trajet, sont très déterminés à « tout péter », pour reprendre les termes de son leader Shawter, et mettre en avant les extraits emblématiques. Pour cela, ils misent sur un jeu de scène habité et une ambiance futuriste appuyée par l’usage de l’électronique. En cela, le son aide, bien calibré et offrant un bel espace d’expression à la voix claire du frontman, de même que les lumières colorées. En outre, qui dit Dagoba, dit wall of death et circle pit de l’enfer, et le show de ce soir ne fait pas exception : Shawter harangue tout en brandissant un drapeau français des spectateurs qui ne demandent que cela et multiplie les uns comme les autres toute la deuxième moitié du set. Malheureusement, sur scène comme dans la fosse, l’espace paraît trop étroit pour permettre à l’univers de Dagoba de s’exprimer pleinement, et je ne peux m’empêcher de penser qu’une programmation sur la T-Stage l’aurait davantage servi…

Dagoba

Alors qu’avance la nuit et que la fatigue se fait ressentir, nous prenons un peu de temps pour nous attarder devant le set de Der Weg einer Freiheit sur la T-Stage. Rareté sur une affiche pas connue pour faire la part belle à ce genre, le groupe joue un black/post-black metal crépusculaire sous des lumières de la même couleur ; idéal pour apporter une conclusion apaisante à une journée marquée par divers degrés de brutalité.

Groupes (19 août) Debauchery, Bloodywood, Lorna Shore, Slope, Vulture, Benighted, Parasite Inc, Napalm Death, Jinjer, Within Temptation, Amorphis

En ce 19 août, un troisième soleil se lève sur le Summer Breeze… sous des nuages qui se font de plus en plus menaçants. Qu’à cela ne tienne, une journée mouvementée nous attend, placée en bonne partie sous le signe du hardcore, de ses dérivés… et des caprices météorologiques.

Après un rapide passage devant Debauchery et son « monster metal » noir et rouge, toujours aussi accessible et efficace par son côté heavy, nous nous joignons aux spectateurs se dirigeant vers la Main Stage et Bloodywood. Pour son premier passage au Summer Breeze, le groupe indien rassemble une foule impressionnante… ce qui, au vu de ce dont il se montre capable sur scène, est totalement justifié ! Les six comparses se donnent à fond et livrent une performance furieuse, à mi-chemin entre Sepultura et Linkin Park, tout en y ajoutant sa patte personnelle très marquée par les influences de son pays d’origine, autant dans l’utilisation d’une flûte et du traditionnel dohol que dans certaines lignes vocales de Jayant Badhula. Entre deux duos chant/rap, ce dernier et son collègue de voix Raoul Kerr témoignent de leur envie d’en découdre avec les maux de la société et ceux qui en sont responsables, envie que le public partage avec ardeur et qui le montre en se jetant dans la mêlée pour mordre la poussière, au sens littéral. Bloodywood se démarque par son originalité et un propos percutant et administre une bonne raclée à des festivaliers dont aucun ne sort indemne. Premier essai transformé !

Bloodywood

Lorna Shore succède, avec quelques minutes de retard dues à des soucis techniques pendant les balances. Deux mois avant la sortie de son prochain opus, Pain Remains, les Américains profitent de l’occasion pour en faire découvrir les extraits promotionnels en version live à un public qui, de toute évidence, n’attendait qu’eux. Le deathcore teinté de quelques éléments symphoniques du groupe tient la route, de même que la présence scénique des musiciens et les capacités du nouveau frontman Will Ramos, toutefois je ne parviens pas à accrocher à ce style et j’ai tôt fait de m’ennuyer…

Lorna Shore

Quelques minutes avant la fin du set, je décide de me diriger vers la Wera Tool Rebel Stage et ses découvertes ; cela commence par Slope et son hardcore. Fidèles aux codes inhérents au style jusqu’au bout des ourlets de leurs T-shirts trop larges, les cinq Allemands ajoutent à cette base une composante funk fort plaisante. En résulte une prestation à l’esprit festif et haute en couleurs, au moins autant que lesdits T-shirts, qui a de quoi accrocher même les non adeptes du punk/hardcore et dérivés. Pour un peu, les moshs en deviendraient presque des danses…

La Wera Tool Rebel Stage accueille en général des groupes plutôt « jeunes » ; à ce titre, la présence en milieu d’après-midi d’un groupe de heavy/speed old-school, nommément Vulture, est quelque peu décontenançant. Décontenançant, certes, mais le style made in 80’s tout en jeans et riffs speedy est loin d’être désagréable, et surtout très efficace pour raviver des spectateurs privés de leur sieste de l’après-midi. Beaucoup moins agréable, en revanche, que d’essayer de profiter du spectacle au milieu de dizaines de personnes venant s’agglutiner sous le chapiteau de la scène pour s’abriter de la pluie… pluie qui finit par s’abattre de plus en plus fort sur un site déjà bien mal en point.

Vulture

Beaucoup de festivaliers étant partis en quête d’un abri, ces derniers se font assez peu nombreux pour Benighted. Qu’à cela ne tienne, ces circonstances a priori peu favorables n’empêchent pas les quatre Français de servir à ceux qui sont là une dose de brutal death à la sauce du pays, c’est-à-dire façon coq au vin, ni à ces derniers d’en profiter à fond. Comme toujours avec Benighted, du sang coule entre des dents cassées, que ni la pluie ni la boue ne viennent diluer. Pas dilué non plus que le sens de l’humour de Julien Truchan, qui se permet quelques bonnes plaisanteries entre deux pig squeals et injonctions au public à se lancer dans des circle pits… Au vu de ce qui se présente, la culture du body horror en musique a encore de beaux jours devant elle !

Benighted

Quatre ans après que Parasite Inc a fêté son retour sur la scène du Summer Breeze, le groupe revient une nouvelle fois avec un nouvel album à promouvoir, Cyan Night Dreams, sorti le jour même ! Il fait plaisir de voir les Allemands retrouver une activité régulière après une longue période d’absence, qui plus est avec une esthétique renouvelée en mode SF/futuriste. Il fait du même coup plaisir de découvrir les extraits du nouvel opus en live, portés par des musiciens qui maîtrisent leur sujet sur le bout des cordes et parviennent à transmettre une nouvelle direction musicale qui suit le même chemin. Nouveaux morceaux se mêlent aisément aux plus anciens et la fluidité du set est très appréciable, bien que manquant quelque peu de fantaisie. Ce qui est moins appréciable, en revanche, c’est bien la présence quasi-constante d’un caméraman filmant la prestation de Parasite Inc en long, en large et en détails. À force de le voir passer sans arrêt entre les musiciens, la prestation n’a presque plus le temps de respirer et il y a de quoi en perdre le fil…

Parasite Inc

Alors que la zone de la T-Stage a largement eu le temps de se transformer en champ de bataille de boue à force de pluie et de passages, Napalm Death risque fort d’élever le chaos ambiant encore un cran au-dessus. Arrivant en fin d’un après-midi marqué par un esprit punk, le groupe « papa du grindcore » en profite pour stimuler des esprits déjà bien échauffés et mettre le feu aux poudres. Pour cela, Mark Greenway ne se prive pas d’exprimer sa colère sur des sujets d’actualité qui ont de quoi fâcher… un sentiment que les spectateurs partagent et expriment en retour en se jetant les uns sur les autres et courant dans la boue, avec quelques belles chutes au programme. Du côté de la scène, Napalm Death ne s’accorde aucun répit et enchaîne les allers-retours entre passé et présent, toujours avec la même teigne. Plutôt facile avec une discographie si large et des morceaux si courts ! Dans tous les cas, Napalm Death a le secret pour rester dans l’air du temps tout en venant de la vieille école. À ne pas louper si vous voulez le connaître !

Après 1914 deux jours plus tôt, d’autres ambassadeurs de l’Ukraine viennent démontrer musicalement leur soutien à leur pays en guerre ; il s’agit, bien sûr, de Jinjer. Pour l’occasion, l’éclairage de scène et le logo du groupe en backdrop se parent des couleurs du drapeau ukrainien, tout comme le maquillage fluorescent qu’arbore Tatiana Shmayluk — et qui lui sied particulièrement bien. Sans surprise pour qui a déjà assisté à un show du quatuor, tous ses membres se montrent plus motivés que jamais et profitent de leur promotion sur la T-Stage pour occuper l’espace sonore à renfort du groove metal progressif qui fait leur personnalité, et physique pour faire passer le message par la gestuelle en plus des notes et mots. La chanteuse en profite bien entendu au maximum, et il y a quelque chose de touchant à voir cette jeune femme toute petite et menue se déchaîner sur scène en enchaînant mélodies haut perchées et passages saturés au débit saccadé qui évoque du rap, ou évoquer la nostalgie que lui inspire le morceau Pisces

Jinjer

Vers 21 heures vient cependant le temps pour moi de me diriger de nouveau vers la Main Stage, histoire de ne pas trop manquer de la performance de Within Temptation. Je ne suis pas la seule à avoir eu l’idée, et nous voici nombreux à prendre la même direction en essayant d’éviter collisions et chutes dans la boue… Par chance, je parviens à me placer assez près de la scène pour profiter du spectacle. C’est en effet bel et bien un spectacle de grande envergure que nous offre le groupe néerlandais, dans un impressionnant décor de scène et avec un des meilleurs sons de ce Summer Breeze. Within Temptation est un de ces groupes ayant accompagné l’adolescence de nombreux fans de metal, moi y compris, pour qui le concert prend bientôt des allures de trip nostalgique qui réchauffe les cœurs et fait presque oublier la pluie qui persiste à tomber… Les membres du groupe contribuent en bonne partie à cette ambiance chaleureuse, partageant entre eux une complicité de tous les moments et ne cachent pas leur joie de retrouver un public qui leur est cher, public qui le leur rend bien. « De nos publics préférés, vous êtes dans notre top 3 ! » assure Sharon den Adel, dont la sympathie et la douceur se ressentent au travers des morceaux comme en dehors. Le groupe fait également bon usage de l’écran de projection, que ce soit pour diffuser des clips en arrière-plan ou l’image des invités sur les morceaux chantés en duo, en dehors de soucis techniques empêchant l’exécution de l’un d’eux. Un des invités fait tout de même son apparition sur scène en la personne de Christoph Wieczorek d’Annisokay, pour le duo Shed my Skin. Après un rappel de trois titres, dont Our Solemn Hour, et le très attendu final Mother Earth, il revient se joindre à Within Temptation pour un salut final digne d’une grande famille…

Within Temptation

Pour sa dernière date de tournée des festivals d’été, Amorphis pose ses valises au Summer Breeze qui lui est familier, valises dans lesquelles il a emmené son dernier opus, Halo. Au vu de ma chronique élogieuse sur ce dernier et de l’amour que je porte au groupe, autant dire que je suis impatiente de voir le rendu des nouveaux titres sur scène. Autant dire aussi que dès l’ouverture qui suit celle de l’album en question, mes attentes sont comblées, et même plus. Comme toujours avec Amorphis, tout est réuni pour un show aux petits oignons : le mixage sonore met au même niveau les talents des six musiciens, lesquels donnent tout ce qu’ils ont malgré la probable fatigue liée à la tournée. Leur joie et leur énergie communicative ainsi que le live ajoutent une dimension reboostée aux morceaux dont la relative longueur et le mid-tempo rendent a priori peu calibrés pour la scène ; j’ai notamment plaisir à découvrir en live The Moon, plus long et préféré morceau de Halo. Aussi comme toujours avec Amorphis à chaque sortie d’un nouvel album, le groupe sait calibrer sa setlist de manière à l’intégrer sans oublier pour autant l’attachement des fans à la période 90’s, dont quelques morceaux emblématiques viennent gentiment s’insérer entre d’autres plus « jeunes ». Par ailleurs, comme Within Temptation juste avant, Amorphis fait aussi bon usage de l’écran de projection, notamment pour diffuser l’image d’Anneke von Giersbergen sur le duo Amongst Stars. Le principal partenaire de duo d’Amorphis reste tout de même son public, avec qui le groupe entre en communion tout au long de l’heure de set jusqu’à sa classique clôture House of Sleep, dont les spectateurs reprennent le refrain en chœur. Le salut final, sur l’émouvant titre acoustique My Name is Night, dégage une émotion intense…

Groupes (20 août) Infected Rain, Nekrogoblikon, Brainstorm, Dark Funeral, Fixation, Blind Guardian, Heaven Shall Burn, Combichrist, Hypocrisy

À défaut de commencer sous l’orage, la journée commence sous la pluie acide d’Infected Rain… et une première déconvenue. En effet, des problèmes techniques retardent l’entrée en scène du groupe, qui se passe un quart d’heure après l’horaire prévu, ce retard impactant la suite de la programmation. Heureusement, aucun impact n’est à déplorer sur la prestation, qui se déroule dans de bonnes conditions. Le son est très correct et met en avant l’aspect futuriste du neo-metal des Moldaves, quoi qu’un peu trop synthétique au niveau de la batterie ; de même que les vocalises chantées et criées d’Elena Cataraga. La chanteuse aux cheveux de néons couleur feu se montre aussi très efficace dans son rôle de frontwoman, et les crowdsurfers se font nombreux à venir à sa rencontre en réponse. Le groupe d’enfants qui traverse la zone entre la scène et les barrières assiste, rapidement certes, à une authentique démonstration de modernité et à une agitation rare en début de journée !

Infected Rain

Les sets de Brothers of Metal et Nekrogoblikon étant programmés en même temps, après hésitation, nous optons pour celui du second. À mon grand dam, cependant, ce choix ne tarde pas à se révéler regrettable… En première cause, un mixage sonore qui tombe dans tous les excès possibles et imaginables et noie les éléments mélodiques et folkloriques sous une avalanche de saturation. En résulte un son brouillon et agressif qui rend la prestation difficile à suivre, ce à quoi la motivation et le dynamisme des musiciens ne changent malheureusement pas grand-chose. Par ailleurs, fidèle à ce qui est désormais une vieille habitude, le groupe est accompagné de sa mascotte John Goblikon, dont les danses et les mimiques amusent la galerie… quelques minutes. À l’instar du caméraman de Parasite Inc la veille, sa présence continuelle sur scène contribue à alourdir un set déjà entaché par le son mal calibré. Vraiment dommage pour moi qui gardais un bon souvenir d’une performance de Nekrogoblikon en première partie de Gloryhammer il y a trois ans…

Nekrogoblikon

Après la modernité, rien de tel qu’un petit retour aux sources ! Brainstorm foule les planches de la Main Stage. Armé de son heavy/power metal à la sauce germanique, le groupe livre aux festivaliers de l’après-midi un set aux riffs et mélodies catchy, soutenu par un mixage sonore bien plus équilibré que sur la prestation précédente. Autre arme de taille pour Brainstorm : l’humeur joviale de ses membres, tous cinq sourire aux lèvres, parfait pour distiller des thématiques qui peuvent l’être beaucoup moins et soutenir une météo aux nuages de plus en plus menaçants. Brainstorm fait souffler un vent d’air frais sur le Summer Breeze, dont tout le monde profite… vent d’air frais qui ne tarde pas à se transformer en saucée lorsque les nuages se lâchent et laissent tomber des trombes d’eau sur les spectateurs encore présents à la fin du set. Pendant que joue un groupe dont le nom comporte le mot « tempête », la coïncidence a de quoi faire rire jaune…

Brainstorm

Après quelques minutes à chercher un abri, c’est sous celui de l’espace VIP que j’écoute la prestation de Fiddler’s Green, malheureusement écourtée pour pallier le retard du début de journée. Je tire en tout cas mon chapeau — ou plutôt la capuche de ma cape de pluie — aux virtuoses allemands du « speed-folk » pour avoir mené leur prestation jusqu’au bout, ainsi qu’aux badauds ayant eu le courage d’y assister sous une telle météo ! Par chance, celle-ci finit par s’apaiser, suffisamment pour sortir retrouver le plein air, la boue et les pavés de la Main Stage.

En raison de contraintes logistiques, Dark Funeral et J.B.O ont échangé leurs créneaux horaires. C’est donc sous la lumière ténue d’un soleil de milieu d’après-midi caché par les nuages que le premier effectue sa prestation ; plutôt ironique pour un groupe habitué à baigner dans les ténèbres. En vérité, cela apporte un petit grain de sel supplémentaire à un black metal qui n’en manque déjà pas… Cela étant, la sauce met un peu de temps à prendre, et ce n’est qu’au moment où Heljarmadr annonce le célèbre My Funeral que le public commence à s’éveiller de sa sieste de milieu d’après-midi. À compter de ce moment, les poings se lèvent, les acclamations fusent, et les musiciens se permettent un retour au présent avec des extraits de leur dernier opus We Are the Apocalypse et autres hymnes à la mort bien connus…

Dark Funeral

Alors que le groupe interprète Nail Them to the Cross, je dois à nouveau quitter le set en avance pour me frayer un chemin jusqu’à la Ficken Party Stage où doivent se produire les jeunes Norvégiens de Fixation. Agréable surprise en studio de par son post-hardcore épuré et sans artifices, j’ai hâte de voir si le groupe sait retranscrire cet état d’esprit dans ses prestations scéniques… questionnement auquel il a tôt fait de répondre par la positive. À quatre, musiciens et chanteur occupent l’espace scénique et au-delà pour délivrer une performance qui ne manque ni d’expressivité ni de professionnalisme, ceci en dépit de l’absence d’un des deux guitaristes et des quelques problèmes techniques rencontrés par le second. Jonas Hansen, en particulier, dévoile une voix tout en nuances, tantôt haut perchée et vulnérable, tantôt hargneuse et agressive. Fixation se livre dans toute son émotion à des spectateurs qui, bien que ni très nombreux ni très prompts à s’agiter dans la boue, réservent un accueil bienveillant à ce jeune groupe prometteur. Une vraie bouffée d’air frais et de sincérité dont j’ai pour ma part hâte de découvrir davantage…

Fixation

Retenue par la suite par une interview avec Fixation, je manque la prestation de Blind Guardian et n’ai donc pas loisir de découvrir les nouveaux titres, issus du prochain album The God Machine, sur scène. Je reviens malgré tout à temps pour profiter des classiques Mirror Mirror et Valhalla en fin de set et de la complicité que le cultissime groupe allemand partage avec son public. Sous un ciel dégagé, que demander de mieux pour une fin de fest ?

Blind Guardian

Au moment du coup d’envoi pour Heaven Shall Burn, son vocaliste Marcus Bischoff fait d’ailleurs la surprise d’un petit hommage au dernier titre du set de Blind Guardian en faisant répéter au public son entêtant refrain… avant que s’ensuivent les traditionnels coups de pétard, annonciateurs d’un show au caractère pour le moins explosif. Les cinq membres du groupe semblent en effet avoir mangé de la dynamite au petit déjeuner tant le concert pète le feu dans tous les sens, sur scène comme en haut de celle-ci ! Il fallait bien cela pour appuyer les sujets « straight edge » pour lequel est connu le groupe et les causes sociétales qu’il défend avec hargne qui leur est due. Je ne vois pas grand-chose de la scène depuis mon positionnement, mais je n’ai aucune peine à visualiser l’agitation qui s’y produit sans nul doute, sans répit ni relâchement.

Trop curieuse, cependant, pour ne pas aller voir ce que donne Combichrist sur la T-Stage, je décide de m’y rendre, quitte à manquer le dernier tiers de Heaven Shall Burn — et à refaire un aller-retour dans la boue. Le show démarre dans une ambiance sombre, sous des basses lumières et des stroboscopes colorés rappelant celle d’une boîte de nuit, et dont le caractère versatile pose pas mal de problèmes aux photographes en matière de gestion de lumière… La performance d’Andy LaPlegua et comparses suit le même chemin, balançant à la tronche du public son mélange tranchant et sans filtre entre metal et aggrotech qui lui vaut désormais sa place à l’affiche de festivals tels le Summer Breeze, aux côtés d’autres groupes métalliques. L’ensemble est pour le moins décoiffant et percutant, mais parfois confus pour les non avertis, entre une puissance sonore agressive pour les tympans et jeu de scène aussi bordélique que l’historique du groupe en matière de line-up. À ce titre, mention spéciale à Elliott Berlin, jouant au yoyo avec la basse et le clavier au moins autant qu’avec son statut de membre de tournée !

Combichrist

De retour face à la Main Stage pour une ultime prestation qui sera celle d’Hypocrisy, force est de constater que la foule est bien moins dense que pour la tête d’affiche ayant précédé. La fatigue aurait-elle pris le dessus sur la fidélité pour les fans du combo suédois ? La question est ouverte. Toujours en est-il que ceux présents sont heureux de (re)voir cette pointure du death metal mélodique mettre à l’honneur son nouvel album Worship sur scène. Les fans ne risquent pas d’être déçus, le quatuor démontrant que neuf ans d’absence ne lui ont rien fait perdre de son talent ni de sa maîtrise au travers d’une setlist qui met en avant bon nombre de titres cultes — Eraser ou Impotent God, pour ne citer qu’eux —, ledit nouvel opus occupant finalement une place secondaire. En tête, Peter Tägtgren montre ses talents de soliste, bien que, de mon humble point de vue, ce sont plutôt les nuances de sa voix qui se distinguent, caverneuses d’un côté, plus hautes et dans un registre black metal de l’autre. Toujours de mon point de vue, malheureusement, si la maîtrise est bel et bien présente, c’est le sens du spectacle qui manque à la prestation d’Hypocrisy pour atteindre des sommets. Mikael Hedlund et Tomas Elofsson sont stoïques et peu mobiles, échangeant leurs places de temps à autre, tandis que la scène se retrouve engloutie dans une quantité excessive de fumée — il est où, le batteur ? On ne le voit plus ! — comme seul effet de mise en scène. Le peu de variété dans le tempo contribue quant à lui à rendre le rythme assez poussif, malgré quelques sursauts. N’ayant pour ma part pas été convaincue par la prestation d’Hypocrisy au Wacken Open Air deux semaines plus tôt, ce n’est pas celle-ci qui me fera changer d’avis, à mon grand regret. C’est ainsi que sur ce show, certes maîtrisé au millimètre mais trop statique, s’achève notre expérience du Summer Breeze 2022.

Que retenir de cette vingt-cinquième édition ? En premier lieu, une affiche somme toute assez classique et dont on aurait peut-être pu attendre un peu d’inédit, surtout pour un anniversaire, ceci étant sans doute lié au passage du Covid… Cela étant, vétérans, nouvelles valeurs sûres et nouveaux venus se sont donnés au maximum pour vivre et faire vivre le festival à fond, et nul besoin d’autre chose pour faire notre bonheur. Parmi eux, quelques bonnes découvertes se détachent du lot. À eux tous, ils valent les deux jours passés à mordre la poussière suivis de deux autres dans la pluie et la boue. Très largement…