Suffocation, Atheist, Soreption, Decerebration
Imperial Bell à Québec
Date 23 juin 2022
Chroniqueur Jean-Charles Baillargeon
Photographe -
https://www.imperialbell.com

23 juin au soir. C’est veille de fête nationale dans la belle province ! La population de la Ville de Québec passe en mode festivités : les balcons arborent des drapeaux québécois, les chansons folkloriques se font entendre, les habitants sortent dans les rues, bière(s) à la main, scandant « Québec ‘sti! ». Une scène est érigée sur les plaines d’Abraham, de nombreux artistes populaires s’y succèdent, la population chante sa fierté québécoise. Bien que j’aie l’habitude d’assister à ces spectacles, j’ai plutôt pris le chemin inverse et je me suis dirigé en basse-ville vers le mythique Imperial Bell…

23 juin au soir. La tournée Forces of Hostility arrive en grande pompe dans la Ville de Québec, où, entre les murs de la salle de spectacle, c’est plutôt le vieux death metal américain qui est à l’honneur. Au menu pour ce soir : Soreption, Atheist et Suffocation ! D’entrée de jeu, c’est un groupe local, Decerebration, qui ouvre le bal. Très énergique, ce groupe nous présente une liste de chansons parsemées de death metal au chant guttural, mettant en avant des morceaux tirés notamment de leur dernier album, Follow the Scars, paru en décembre dernier.

Soreption prend le relais. Originaire de Suède, le groupe nous offre près d’une dizaine de chansons issues de son catalogue, dont quelques-unes de son tout dernier album, Jord, paru le 10 juin. Ce qui retient l’attention, outre le jeu de guitare technique et la batterie rapide, c’est la prestance du chanteur Fredrik Söderberg. Ce colosse, lorsqu’il ne chante pas, impose son regard à la foule : fixe, immobile, mais totalement terrifiant. Maîtrisant également le chant guttural, il se permet quelques headbangs de temps à autre. Malheureusement pour le groupe, on dénombre peu de spectateurs dans l’assistance compte tenu, du moins, de la grande capacité de la salle. Cela permet toutefois aux plus énergiques de se défouler aisément dans le grand espace vide créé dans le parterre.

La prestation s’achève et je commence à avoir vraiment hâte de voir Atheist, pour son tout premier concert dans la ville de Québec. Je ne vous cacherai pas que je suis un grand fan de ce groupe de death metal technique, qui doit sa réputation à ses trois premiers et principaux albums de sa trop courte carrière. On doit toutefois patienter près de 45 minutes avant l’entrée en scène du groupe, mais l’attente en valait la peine ! Guidé par son charismatique chanteur Kelly Schaefer, seul membre original sur scène, le groupe nous offre d’emblée une série de chansons principalement tirées de deux albums classiques, Piece of Time et Unquestionnable Presence. On est rapidement impressionné par la voix de Schaefer, fidèle à celle d’il y a trente ans. Celui-ci ne manque d’ailleurs pas d’énergie sur scène. L’homme de 53 ans, visiblement passionné par la vie de tournée, a le sourire aux lèvres en permanence, arborant son classique look bandeau/casquette et dansant continuellement, à sa manière, au rythme des mélodies.

Le succès d’Atheist repose d’ailleurs sur les talents du défunt bassiste Roger Patterson, qui est considéré comme une grande influence dans le milieu. C’est donc le bassiste Yoav Ruiz-Feingold qui a la lourde tâche de rendre hommage à la légende et wow ! Quel musicien ! Ce dernier maîtrise à la perfection son instrument et sa présence sur scène est remarquable ! Se promenant de tout bord et de tout côté, il n’hésite pas à faire aller son imposante chevelure bouclée dans un headbanging circulaire. Les yeux de la foule étaient rivés sur lui durant l’heure qu’a duré le spectacle, il fut définitivement mon coup de cœur de la soirée !

Grosse déception toutefois : parmi leur performance de 12 chansons, Atheist n’en a joué aucune provenant de l’excellent album Elements, un choix que je peine à expliquer. Toutefois, on se console en remarquant l’extraordinaire performance qu’a livrée le quintet, fidèle aux sonorités des albums d’antan. Le groupe s’est d’ailleurs gardé les morceaux Mother Man et Piece of Time pour la fin. L’exécution était parfaite, j’en avais des frissons.

Atheist, grandement applaudi par la foule, se retire et laisse place à Suffocation. On remarque d’ailleurs que l’audience s’agrandit dès le début du concert, et que les spectateurs aux t-shirts à l’effigie de la tête d’affiche se multiplient. Le groupe entre finalement sur scène, interprétant d’emblée la violente Liege of Inveracity, ce qui provoque le délire du public. Ricky Myers, chanteur du groupe depuis 2019, impose à la perfection son cri guttural, attirant le regard principalement en raison de son corps musclé jonché de tattoos. Son physique imposant est bien à l’image du brutal death metal. Le bassiste Derek Boyer retient également l’attention notamment par le positionnement de son instrument, le plaçant à la verticale, un peu comme s’il jouait de la contrebasse. Plus discret, on aperçoit également le guitariste principal Terrance Hobbs, seul membre original de Suffocation, faisant aller ses minces dreads dans un constant mouvement de tête.

L’intensité est à son comble et le groupe enchaîne avec une bonne brochette de morceaux, interprétant des chansons provenant de six albums différents (sur une discographie complète de huit albums studios), en plus de deux chansons provenant d’EP’s. Dans l’heure qu’a duré le concert, Suffocation a interprété 14 chansons dont la majorité provenait de leurs premiers albums issus des années 90, faisant sans doute plaisir aux amateurs de longue date du groupe. Il est d’ailleurs très impressionnant de voir le batteur Eric Morotti conserver un tempo extrêmement rapide durant l’entièreté du concert. L’énergie sur scène est palpable, et on constate que le groupe a du plaisir lorsque Myers, entre deux chansons, prend un moment pour souligner l’anniversaire de Boyer. C’est à ce moment que les membres d’Atheist et de Soreption profitent de l’occasion pour revenir sur scène, offrant au fêté un gâteau et l’abreuvant de quelques gorgées de bières. La tournée Forces of Hostility tournant à sa fin, les groupes avaient visiblement eu le temps de tisser des liens d’amitié entre eux.

Durant le concert, la foule ne manqua pas d’énergie, multipliant les moshpits violents et les crowd surfings. Malheureusement, il y avait très peu de sécurité dans l’enceinte. Quelques spectateurs en profitèrent pour monter et danser sur scène, provoquant la frénésie d’un membre de l’équipe technique. Les membres du groupe ne se laissèrent toutefois pas distraire et continuèrent à interpréter leurs morceaux comme si de rien n’était. Concluant avec Surgery of Impalement, Suffocation salua la foule une dernière fois, qui l’acclama en retour. C’est vers 23h30 que je quittais l’Imperial Bell avec, je dois l’avouer, un certain mal de tête, mais la sensation d’avoir assisté à un excellent spectacle !