Pain of Salvation, Vulkan
Kulturhuset Studion, Stockholm (SE)
Date 23 avril 2025
Chroniqueur Marc A
Photographe Marc A
https://kulturhusetstadsteatern.se/uthyrning/studion

Accompagner l’un de ses groupes favoris sur une partie de sa tournée et découvrir les coulisses de la vie sur la route relève de l’expérience exceptionnelle pour tout passionné de musique.

Cette opportunité rare m’a été offerte grâce à mon implication en tant que co-organisateur, aux côtés de mon ami Marcus de Progressive Circus, des concerts de Vulkan et Pain of Salvation à Stockholm et Göteborg, les 23 et 24 avril derniers. J’ai toutefois décidé de ne chroniquer qu’un seul de ces concerts (celui de Stockholm), dans la mesure où le second s’est avéré assez similaire dans la setlist, l’ambiance générale, la réception du public et surtout en terme de qualité.

C’est à Vulkan que revient la tâche d’ouvrir cette soirée qui s’annonce mémorable. Le groupe investit la scène avec assurance devant les spectateurs auxquels il va proposer une setlist dominée par les titres de Technatura, leur album le plus récent, avec pas moins de quatre morceaux sur les sept joués.

Le set débute en force avec le percutant This Visual Hex. L’atmosphère se fait ensuite plus posée avec From Here to Where It All Ends (Terminus), tiré de leur album Observants (2016), avant de remonter en intensité avec Redemption Simulations et ses rythmiques tribales.

Le groupe enchaîne ensuite les morceaux marquants  : l’instrumental The Luning, l’envoûtant Blinding Ornaments, Rekviem, chanté en suédois et particulièrement applaudi, puis The Royal Fallacy qui conclut le set avec panache.

Vulkan livre une performance aussi précise qu’énergique, qui rend hommage aux versions studio, tout en les transcendant par une intensité live indéniable. Le public ne s’y trompe pas et ovationne chaque titre. Si les musiciens adoptent une tenue scénique plutôt statique, leur maîtrise instrumentale compense largement : Johan Norbäck imprime, de derrière son kit, les pulsations rythmiques pleines de groove ; Oscar Pettersson délivre des lignes de basse riches et organiques; Christian Fredriksson cisèle ses riffs acérés; Olle Edberg tisse des atmosphères immersives aux claviers; et Jimmy Lindblad, avec une sincérité palpable, assure, en plus de sa prestation de haut niveau, un lien chaleureux avec le public.

Après cette excellente performance, il est temps pour le groupe de quitter la scène sous un tonnerre d’applaudissements du public, définitivement gagné à sa cause.

En l’espace de sept titres et 45 minutes, Vulkan démontre avec brio toute la puissance de son heavy prog alternatif moderne, consolidant ainsi sa position d’étoile montante parmi les formations les plus prometteuses de la scène metal progressive actuelle, aussi bien en studio qu’en live.

Entracte !

Depuis 2018, Pain of Salvation n’avait plus joué en Suède. Autant dire que le retour du groupe était attendu comme le messie par ses fans les plus fidèles. Quand le rideau noir tombe enfin, l’excitation est à son comble.

Le show démarre sur les chapeaux de roue avec Accelerator, extrait de Panther, son dernier album en date. Dès les premières secondes, la puissance sonore cloue littéralement le public au mur. Le groupe rappelle d’emblée que derrière ses explorations progressives, sa musique est d’une puissance rare, décuplée par le passage en live.

Chaque musicien apporte sa pierre à ce mur du son. Daniel Gildenlöw et un Johan Hallgren possédé balancent des riffs syncopés d’une force redoutable, pendant que Léo Margarit imprime ses rythmiques complexes avec une précision implacable. Plus discret mais tout aussi essentiel, Per Schelander assure une base rythmique solide, tandis que Vikram Shankar (qui a fait le voyage depuis les États-Unis pour assurer ces quelques dates) tout aussi explosif que Hallgren, enrichit l’ensemble de nappes mélodiques et ses motifs électro nerveux.

Dès ce premier titre, une évidence s’impose : Pain of Salvation n’est pas seulement un groupe de musiciens virtuoses, c’est aussi une bande de potes soudée par une véritable alchimie. Cette complicité, palpable aussi bien dans l’interprétation que dans l’atmosphère générale, rejaillit sur le public, créant une connexion immédiate et électrique. Connexion qui va perdurer tout au long de cette soirée qui débute sous les meilleurs auspices.

Reasons, autre décharge électrique aux riffs tout aussi syncopés, surgit sans crier gare. Daniel y crache son texte d’un chant furieux et habité qui électrise l’atmosphère. À peine le temps de souffler que retentit Meaningless, l’un des hymnes incontournables du groupe, repris en chœur par un public conquis.

Mais Pain of Salvation sait aussi ménager des îlots de calme au milieu de cette tempête sonore. Wait offre un moment  délicat et poignant, qui apaise l’ambiance sans pour briser autant la dynamique du concert. Le groupe relance ensuite la machine avec le plus ancien Used aux accents nu metal/rap, puis enchaîne avec Panther pendant lequel les musiciens sont affublés de masques de chien pendant que le clip vidéo du titre est projeté sur l’écran géant en fond de scène. Daniel, hilare, raconte avoir acheté un lot de cent masques « au cas où », provoquant un fou rire général.

Le concert se poursuit avec Restless Boy, autre extrait de Panther, décidément à l’honneur ce soir, puis On a Tuesday qui donne l’occasion au public de decouvrir les talents de chanteur de Léo Margarit qui interprete l’interlude de mi-morceau presque a cappella, seul debout derrière son kit, baigné dans une lumière dorée. Un moment suspendu, d’une grande délicatesse, qui prend malheureusement fin trop rapidement à mon goût.

Autre moment fort en émotion : l’intro de Falling, portée par un solo de guitare aux accents gilmouriens, qui s’élève doucement dans la salle. Daniel Gildenlöw, à genoux devant les claviers de Vikram Shankar, livre une interprétation toute en fragilité et en retenue. Face à lui, le keyboardiste ferme les yeux, visiblement absorbé par la magie de l’instant, tandis qu’en toile de fond s’affiche la pochette emblématique de l’album The Perfect Element, comme une réminiscence pour les fans de la première heure.

Puis vient le morceau The Perfect Element, enchaîné sans transition, qui permet à Léo de briller à nouveau lors d’un solo de batterie final d’une grande intensité. Le concert se poursuit avec Chain Sling et son ambiance médiévale, avant d’atteindre l’apothéose avec Icon, long morceau sinueux et chargé en émotions.

Sous des applaudissements nourris, le groupe quitte la scène… pour mieux revenir avec Beyond The Pale, en forme de clin d’œil aux fans de longue date. Le concert s’achève sur une note profondément intime avec le déchirant In The Passing Light Of Day, dédié par Daniel à son épouse présente dans la salle.

Il est fascinant de constater l’énergie déployée par les musiciens après près de deux heures de concert. Si Daniel Gildenlöw est toujours aussi expressif, Johan Hallgren lui vole presque la vedette, véritable pile électrique, courant dans tous les sens tout en assurant les chœurs et ses parties vocales avec une aisance déconcertante. Plus discret, Per Schelander profite de quelques incursions au centre de la scène pour chauffer la salle. Quant à Vikram Shankar, s’il est limité dans ses déplacements par son rôle de clavieriste, il ne se prive pas de headbanger dès que l’occasion se présente.

Des jeux de lumière astucieusement pensés aux vidéos projetées en arrière-plan (clips, pochettes d’albums…), en passant par une setlist équilibrée, une ambiance de franche camaraderie sur scène et un lien magique entre le groupe et le public, tout a contribué à faire de cette soirée un moment inoubliable pour les plus de trois cents spectateurs présents. D’autant plus impressionnant quand on sait (d’après un membre du groupe) que les musiciens n’avaient bénéficié que d’une seule répétition pour préparer ce show.

Cerise sur le gâteau, après un rapide passage en coulisses pour se désaltérer, les musiciens reviennent à la rencontre des nombreux fans restés dans la salle après la fin du concert en espérant pouvoir échanger avec leurs héros. Tous se montrent d’une grande disponibilité, prenant le temps de discuter, poser pour des photos, signer des autographes, et partager un moment précieux avec ceux qui les soutiennent. Une fin chaleureuse à une soirée déjà exceptionnelle qui laissera dans la tête des spectateurs, et dans la mienne, des souvenirs impérissables.