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Le Metal avant-gardiste de Queensrÿche a toujours alimenté la critique musicale. Que ce soit en bien ou en mal, l’orientation musicale, parfois novatrice, des Américains, a toujours été scrutée, contestée puis adulée. Avec le recul, il faut bien avouer que des albums comme Operation Mindcrime ou Empire sont devenus de véritables chefs-d’œuvre indispensables dans la discographie des amateurs de heavy Metal de la fin des eighties et du début des nineties. L’émergence du grunge aura certes eu raison de la notoriété du groupe qui, petit à petit, s’est enlisé dans les méandres de l’indifférence générale. Il fallait donner un grand coup de pied dans la fourmilière pour tenter de sauver ce qui pouvait encore l’être. L’exclusion de Geoff Tate ne s’est pas faite sans casse puisque l’affaire s’est prolongée devant les tribunaux, gâchant par la même occasion le développement musical du groupe. Même si à la fin, Queensrÿche ne compte plus que deux musiciens originels, le guitariste Michael Wilton et le bassiste Eddie Jackson, sa musique semble, elle, toujours bien au point. En dépit du départ, en 2018, du batteur Scott Rockenfield pour lequel de nouvelles poursuites judiciaires ont été menées par l’évincé, Digital Noise Alliance s’inscrit dans la continuité de l’excellent The Verdict, sorti trois ans plus tôt.
Les Américains se sont, à nouveau, attaché les services du producteur Zeuss. Dès les premières notes de In Extremis, on retrouve le Queensrÿche audacieux des débuts qui propose un Metal mélodique qui dépasse allègrement le cadre couplet-refrain-couplet avec une construction musicale plus alambiquée avec ces chœurs inhérents à une musique parfaitement identifiable. La prestation vocale de Todd La Torre ressemble, à s’y méprendre, aux meilleures livrées de Geoff Tate. Mais à l’écoute de The Chapters, on mesure mieux l’apport personnel du vocaliste qui pose véritablement sa patte sur le surprenant titre Sicdeth. Ce morceau colle à merveille à l’esprit créatif des gars de Seattle. La prestation lyrique du vocaliste est encore plus impressionnante sur Behind the Walls qui emprunte les codes plus classiques du heavy metal.
Le jeu de guitare de Michael Wilton n’a rien perdu en puissance, ni en douceur et en justesse comme en témoigne le morceau mid-tempo Out of the Black. Il s’agit d’un intermède parfait sur cet album de 12 titres puisqu’il introduit la très belle ballade Forest qui s’éloigne, fort heureusement, des standards du genre grâce, justement, à un dédoublement des guitares très bien soutenu par Todd La Torre dans un autre registre vocal encore.
Hold On est, sans aucun doute, le titre qui rappelle le plus la vieille enseigne du groupe même si les riffs sont plus lourds et plus puissants que naguère. Ce constat se répète sur Tormentum où le jeu de double caisse opéré par Casey Grillo (ex-Kamelot), qui a succédé à Scott Rockenfield, est juste époustouflant. La reprise Rebel Yell (Billy Idol) qui clôt l’album, offre un moment de légèreté inédit mais particulièrement bienvenu à cet ensemble très cohérent.
Mais soyons de bon ton, plusieurs écoutes seront indispensables pour se familiariser avec Digital Noise Alliance. Car contrairement à ce que son titre pourrait laisser paraître, la qualité sonore et musicale de cette dix-septième livrée dépasse largement le bruit de couloir. Reste à voir si le groupe surmontera, une fois encore, sur la durée, les multiples recours en justice dont il est injustement l’objet.