Site Internet
Les albums se suivent et ne se ressemblent pas — totalement. Cette remarque peut sembler hors contexte, voire à côté de la plaque, lorsqu’elle est formulée à propos d’un nouveau disque de Saxon. Pourtant, Carpe Diem renferme plusieurs éléments qui, s’ils inscrivent bien évidemment cet album dans la tradition immuable du groupe, lui confèrent un charme qui, bien que seul l’avenir le confirmera ou non, pourrait le mener à devenir un des favoris des fans… du moins pour ce qui est des albums sortis dans le siècle actuel. Ceux de l’époque la plus glorieuse demeurent évidemment intouchables !
Depuis le fantastique Metalhead (1999), la musique de Saxon s’est en effet faite plus heavy, lorgnant vers des riffs plus durs et frôlant parfois la limite du thrash par le biais de tempos souvent rapides. Cela étant, les musiciens ne relèguent pas pour autant les plages heavy plus traditionnelles et les phrasés chaloupés qui font leur style — bien loin s’en faut.
Il faut bien le reconnaître, au rythme soutenu d’un album tous les deux à trois ans, difficile de pondre un chef-d’œuvre à tous les coups et la pensée « voilà un album de plus » peut aisément poindre dans l’esprit de l’auditeur. Néanmoins, sur Carpe Diem, ce dernier ressentira très certainement un groupe remonté à bloc. La production d’Andy Sneap, aux manettes depuis Sacrifice (2013), fait ressortir cette énergie à travers un rendu sonore ample, clair et dynamique. En parallèle, il semble que l’époque que nous vivons ait eu un réel impact sur l’état d’esprit du groupe ; état d’esprit qui veut résolument rester positif malgré les tourments. La plage éponyme, en ouverture, l’affirme d’ailleurs. Carpe Diem (« cueille le jour », en français) est un conseil qu’il est toujours agréable d’entendre, surtout s’il est promulgué sur une musique heavy/speed bien sentie. Le refrain est bref et déclamé de façon incisive. « Carpe Diem – Seize the Day », asséné sur un riff efficace, voilà qui est bien dit !
Age of Steam poursuit dans cette lignée de par un style rapide et puissant ; énergie et belle qualité d’écriture sont au rendez-vous. Pilgrimage, quant à lui, crée la surprise avec une progression en arpèges évoquant le classique ultime qu’est Crusader, ainsi qu’un rythme mid-tempo dans les passages acoustiques, qui ramènent le fan aguerri vers Requiem (We Will Remember), titre paru sur Solid Ball of Rock (1990). De belles références qui constituent une exception au fait que Saxon, contrairement à beaucoup de groupes à la carrière plus ou moins longue, évite autant que possible de recycler ses propres riffs. Certes, son style reste reconnaissable entre mille et certaines ressemblances entre des titres de différentes époques peuvent exister. Malgré le fait qu’un fan ultime, qui connaîtrait toute la discographie des British sur le bout des doigts, pourra toujours contredire cette affirmation, Saxon ne se répète jamais outre-mesure.
Les compositions sont majoritairement construites sur des schémas assez rapides et il semble que la position d’Andy Sneap en tant que guitariste suppléant dans Judas Priest, dont il a par ailleurs coproduit l’acclamé Firepower (2018), ait légèrement influencé l’orientation d’un titre comme Super Nova. Ce dernier n’est pas sans rappeler le Priest et ses titres speed, la voix aiguë en moins. Enfin, comme pour trancher, Lady in Gray, à la fois lent, heavy et mélodique, complète la palette sonore de ce Carpe Diem plus que recommandable.
Dans le domaine des vins, il peut exister de subtiles différences entre un millésime et un simple bon cru. Elles ne sont pas toujours faciles à exprimer, mais qui les goûte les remarque. Carpe Diem renferme beaucoup de touches qui tendent à le hisser dans la première catégorie !