Metallica, Guns'n'Roses, Alice Cooper, Mercyful Fate, Scorpions, Airbourne, Kreator, Helloween,...
Clisson, France
Date du 23 au 26 juin 2022
Chroniqueur Oli de Wacken
Photographe Marc Coupris
https://www.hellfest.fr

À force de volonté et de travail, l’équipe du Hellfest, dirigée par Ben Barbaud, a su hisser le festival clissonnais au plus haut niveau pour le faire rivaliser, et cela est une réalité depuis pas mal d’années déjà, avec les plus grands, et présenter des affiches défiant toute concurrence.

Mais pas question, bien évidemment, de vous relater les concerts des plus ou moins deux cents groupes présents à cette deuxième semaine de festivités, et contentons-nous de vous faire apprécier virtuellement, ou revivre, certaines prestations choisies de la manière la plus éclectique possible. Pour ce jeudi 23 juin, retenons, entre autres, Steve Vai, dont le nouvel opus, Inviolate, est sorti il y a quelques mois. Ce prodige possède le don de ravir un public pas forcément féru de musique instrumentale ou de prouesses guitaristiques, tant son répertoire se montre varié, tour à tour rock, atmosphérique ou chaloupé. La belle affluence devant la grande scène tend à confirmer cette affirmation mais déjà, une question nous taraude : Whitesnake va jouer juste après, sur l’autre main stage. Donc, quid d’une apparition du grand Steve aux côtés de David Coverdale, dont il fut le guitariste de 1989 à 1991 et avec qui il enregistra l’album Slip of the Tongue du Serpent Blanc ?

Et bien, place à Whitesnake. La setlist fait la part belle aux tubes des années 80, de quoi ravir un public qui n’attendait que cela, donnant de la voix pour soutenir un David Coverdale… qui en a bien besoin. Quasi inaudible lorsqu’il doit monter dans les aigus, il fait peine à entendre. Faiblesse passagère ou problème plus profond ? Lui seul doit le savoir, mais nous apprendrons que, quelques semaines plus tard, une infection des cordes vocales aurait été diagnostiquée. Mais la magie de la musique fait que tout cela n’entache pas, ou si peu, le plaisir des spectateurs. Entendre, en live, tous ces titres intemporels et indémodables, qui ont bercé plus d’une génération, quel bonheur ! Mais Steve Vai, alors ? Viendra ou viendra pas ? Coverdale taquine le public : « Once a Snake, forever a Snake » (ndlr : « Serpent un jour, Serpent pour toujours » ). Mais pour Fool for Your Loving, de l’album Ready an’ Willing (1980) mais réenregistré avec sur Slip of the Tongue en 89, Steve ne viendra pas. Il faudra attendre le superbe final constitué du non moins fabuleux Still of the Night, avec lequel le guitariste n’a rien à voir, pour que celui-ci débarque sur scène pour nous donner à vivre, mine de rien, un petit moment d’anthologie, de par sa simple présence aux côtés de son ex-compère. Que du bonheur, malgré les soucis du sieur Coverdale à qui nous souhaitons ardemment de recouvrer toutes ses facultés vocales.

Restons du côté des scènes principales avec Helloween, toujours en mode « l’union fait la force », puisque le line-up regroupant les vocalistes Michael Kiske et Andi Deris et renforcé par Kai Hansen à la guitare semble vouloir perdurer. Une setlist en forme de best-of qui pioche dans toutes les époques, avec les deux chanteurs qui reprennent les titres dont ils sont respectivement titulaires, mais qui peuvent aussi partir en duo, montrant que les egos n’ont pas de place chez les Teutons. Présence de Kai Hansen oblige, celui-ci donnera aussi de la voix à l’occasion de cinq titres interprétés à la suite et issus de Walls of Jericho. Le classique Ride the Sky est de la partie, mais nous nous délecterons aussi des moins évidents Metal Invaders, Victim of Fate, Gorgar, et Heavy Metal (Is the Law). Bref, le régal absolu ! Le tube I Want Out en rappel, et c’est déjà tout. Dieu, que le temps passe vite.

En tête d’affiche de cette première journée, Scorpions. Les bestioles ont pu montrer quelques signes de faiblesse épisodiques lors de ses dernières tournées, mais ce soir, tout roule à merveille et Klaus Meine, en particulier, est en forme. La setlist prend aussi des allures de best-of tout en mettant en valeur le très recommandable dernier album, Rock Believer. En rappel, après le traditionnel Still Loving You, Rock You Like a Hurricane nous réserve une surprise : Phil Campbell, ex-Motörhead, qui se produisait plus tôt en journée avec ses Bastard Sons, apparaît sur scène. Réunion de famille, en quelque sorte, puisque le batteur Mikkey Dee fit lui aussi partie de Motörhead pendant d’innombrables années. Tout cela débouche évidemment sur un hommage à Lemmy Kilmister. Et en avant pour un Overkill rehaussé d’un long solo de batterie avant le baisser de rideau.

Vendredi 24 juin. Direction « The Temple », l’un des chapiteaux, sous lequel se succèdent principalement des groupes d’obédience extrême. Witchery joue avec un léger handicap puisque l’un des guitaristes manque à l’appel, victime du Covid. Au niveau du rendu sonore, cela s’entend, mais le groupe se débrouille pour minimiser cet impact négatif, et la qualité intrinsèque de son répertoire thrash/black ferait presque oublier cet inconvénient. Restless and Dead, plage titulaire du premier album (1998) fait toujours autant d’effet, et The Reaper, issu du même opus, clôt un set que les Suédois ont bien du mérite à avoir mis en place de façon satisfaisante, compte tenu des circonstances.

Ihsahn, un peu plus tard sur la même scène, montre tout son éclectisme à travers un choix de titres alternant des passages black foudroyants, un titre rock aux relents hendrixiens, des chœurs funk/soul… et pour terminer, une reprise de Wrathchild d’Iron Maiden, avec voix black metal. Très bon concert.

Retour à l’air libre, mais sous la pluie, pour apprécier Kreator en main stage. Carré comme toujours, Kreator ne déçoit pas. La nouvelle recrue, le bassiste Frédéric Leclercq, fait sa première apparition live avec le groupe et s’adresse au public à l’occasion de son anniversaire, mais aussi pour exprimer son bonheur d’être là. La sincérité, ainsi qu’une certaine émotion, transparaissent au ton de sa voix, transformant son intervention en l’un de ces petits moments dont on se souvient.

Il pleut toujours, cela dure depuis des heures, et il est nécessaire de s’armer d’un certain courage pour assister au passage d’Alice Cooper. Tous les éléments traditionnels du show sont évidemment là : l’infirmière sadique, Alice qui tente de s’extraire de sa camisole de force, la guillotine, etc. Les néophytes s’extasient à juste titre et les vieux fans sont toujours aussi ravis, même s’ils savent très bien à quoi s’attendre. Alice Cooper, père de la mouvance « shock rock », sans qui bien des icônes apparues par la suite ne seraient pas ce qu’elles sont — ou ne seraient pas, tout simplement —. Alice Cooper, qui a fini de se renouveler depuis longtemps, mais qui ravit toujours son public et continue à remplir les salles. Alice Cooper qui, du haut de ses 73 ans et malgré les excès qui auraient pu lui coûter la vie durant sa première partie de carrière, tient toujours une forme olympique. Et nous ne le savions pas à ce moment, mais nous avons assisté à l’un des derniers concerts de la guitariste Nita Strauss, qui annonça son départ quelques semaines plus tard. La magie du show d’Alice Cooper nous fait oublier le déluge, qui finira cependant par cesser peu avant la fin du concert.

Samedi 25 juin, 12h15. Michael Monroe, dont le nouvel et excellent album I Live Too Fast to Die Young vient de sortir, nous livre une prestation très enthousiasmante, bien hard rock, énergique, et nous montre un frontman en très bonne forme physique — ce qui n’était pas forcément une certitude a priori —, et forcément, toujours aussi poseur, mais c’est aussi pour cela qu’on l’aime. Voilà une journée qui commence bien !

Hällas joue à 14h30 sur la scène de The Valley, le chapiteau dédié aux musiques planantes et décalées. Pas question de rater ça ! Les Suédois ont su, grâce à trois albums et autant de pépites, s’attirer les louanges de tous ceux qui ont eu la curiosité de prêter une oreille à leur musique. La fan base grossit lentement mais sûrement, et la signature chez Napalm Records ne pourra qu’accélérer le mouvement. Belles ovations pour les titres les plus catchy du dernier album, Isle of Wisdom. Le mélange de classic rock, de progressif et de touches bucoliques, mais pas foncièrement folk, est mijoté avec un tel savoir-faire qu’il est presque impossible d’y résister, pour peu que l’on soit réceptif aux styles en vogue dans les années 70.

Petit tour en direction de la mainstage 1, pour Myles Kennedy and Company. Le rock, bien plus rock que hard, très américain et mainstream, de Myles Kennedy, est très bien écrit et interprété. Rien à dire, c’est le cas de le dire. Oui, c’est bien foutu, et le public répond présent. Mais nous cherchons toujours ce qui fait courir les foules pour cet artiste très radio friendly de l’autre côté de l’Atlantique, dont la musique est cependant tout sauf exceptionnelle. Tant mieux si ça plaît. Merci Slash ?

Airbourne, sur la même scène, c’est autre chose. La grosse foule est présente et le groupe le mérite. Certes, les formations très influencées, et c’est un euphémisme, par AC/DC, sont pléthore. Mais Airbourne… quel punch, quelle énergie, et quels titres ! Et que dire de Joel O’Keeffe, performer ultime, qui nous fait Bon Scott et Angus Young à lui tout seul. En troisième position dans le set, Too Much, Too Young, Too Fast, extrait du superbe album (le meilleur?) Runnin’Wild, fait monter la température, déjà bien élevée, d’un cran. Celle-ci ne redescendra pas !

Petit dilemme, à présent. Nightwish ou Discharge ? Optons pour les légendes du punk hardcore britannique, et direction la Warzone, scène en plein air dédiée à ce style musical. Le son est un peu faible et a tendance à amoindrir la force de frappe du combo, dont les concerts font généralement l’effet d’un parpaing en pleine gueule. JJ Janiak, chanteur depuis 2014, connaît son boulot et se donne à fond, il crache à tout-va, comme tout bon punk qui se respecte. Vingt-deux titres pour une heure de show et pas mal de moments intenses. Parmi ceux-ci, citons, bien que cela soit très subjectif, Protest and Survive, en provenance du premier et méga-classique album Hear Nothing See Nothing Say Nothing de 1982.

Retour à The Valley pour Kadavar qui propose un bon aperçu des différents aspects de sa musique, tantôt lourde, tantôt psyché, ou teintée de stoner. En l’occurrence, la première partie du show se montre heavy, incitant le chanteur/guitariste Christoph «Lupus » Lindemann à secouer sa grosse tignasse bien seventies. Le point d’orgue du concert sera le hit Die Baby Die après quoi la musique prendra une tournure plus psyché et planante pour nous mener au bout d’un set des plus intéressants.

Difficile de se frayer un chemin dans la foule pour assister en bonne place au concert des tant attendus Guns N’Roses. Las, au bout d’un temps, on laisse tomber pour aller voir, après Discharge, un autre groupe historique de la mouvance punk : GBH. Il fait à présent nuit, et le spectacle qui s’offre à nos yeux est quelque peu étrange. La pyrotechnie donne de partout dans l’enceinte de la Warzone où le groupe se produit, et les écrans géants sont de la partie. En parfait décalage avec l’esprit punk d’un groupe comme GBH que l’on imagine mieux dans un petit club mal famé de l’East-End londonien que dans une superproduction. De quoi faire bondir les puristes, sans doute, mais peu importe. La musique est là, et GBH est digne de ce que l’on attend de lui. Un hommage à Lemmy, sous la forme d’une reprise de Bomber de Motörhead, conclut les hostilités en toute beauté.

Dimanche 26 juin. En début d’après-midi, sur la mainstage 1, Angelus Apatrida prouve que la relève est bien là en matière de thrash metal et que les Exodus, Testament et autres cadors du genre n’ont pas de soucis à se faire quant à leur succession. Angelus Apatrida fait montre des atouts de sa jeunesse — tout est relatif, ce ne sont plus des gamins non plus — et l’énergie déployée sur scène par les Espagnols nous rappelle ce qu’était un concert de thrash au temps de la splendeur des pionniers du genre.

Des événements, au sens premier du terme, le Hellfest en propose toujours. Parmi ceux-ci, un concert unique regroupant sur une même scène Regarde les Hommes Tomber et Hangman’s Chair était à ne pas rater. Le pari, pas évident, de marier les styles et les répertoires des deux groupes de façon homogène et cohérente, est gagné. Bien plus, le résultat est bluffant. On passe du black torturé au doom spleenesque et inversement le plus naturellement qui soit, et le nombre de musiciens présents simultanément sur scène ne nuit en rien à l’intelligibilité de la musique. Malin, bien vu, carrément génial et excellent. Assurément l’un des temps (très) forts de tout le festival !

Midnight. Ce n’est pas l’heure, c’est le trio qui se produit à présent et qui nous offre un petit plaisir régressif à l’aide de son speed black’n’roll basique, teinté de heavy par moments. Un beau marcel pour le guitariste, perfecto et cartouchière sur torse nu pour le bassiste/chanteur. Pas de doute, on soigne le look chez Midnight. Et au fond, bien que la voix soit typée black metal, ce heavy/speed est un peu fait pour les amateurs de la vieille garde, c’est-à-dire les fans d’Exciter et consorts.

Changement radical de genre avec Ugly Kid Joe, de retour aux affaires depuis quelques années et qui s’apprête à sortir un nouvel album, The Sky Is the Limit, dont la plage titulaire, bien dans la tradition du groupe, sera interprétée. Un avant-goût prometteur. Ceci dit, le set débute avec Neighbour, l’un des titres phares d’America’s Least Wanted, le premier album et aussi le plus apprécié. Les anciens se souviennent, avec le sourire, du clip vidéo hilarant qui accompagnait ce titre, et qui a fait les beaux jours de MTV en 1992.

Et pour la fin, l’autre tube, Everything About You, et encore un hommage à Lemmy et Motörhead avec une reprise d’Ace of Spades. Mais dans l’ensemble, malheureusement, une légère impression de mollesse se dégage. Une attitude plus pêchue aurait valorisé la performance des Californiens.

Archgoat pratique un black metal ultra basique avec un chant death. Pas d’intro, pas de communication avec le public (ça fait partie du truc), bam, direct dans la face. C’est basique à souhait. En début de concert, la voix est inaudible puis le son s’améliore. C’est speed et ça ne ralentit que rarement. Assez chouette, finalement.

Mgla : encore du « black à capuches », comme disent certains de mes amis. C’est un peu moqueur, mais qui aime bien châtie bien, n’est-ce pas ? Bref, capuches et visages cachés, ainsi qu’une attitude semi-statique, confèrent une certaine aura au groupe, qui a le vent en poupe depuis un certain temps. Le son est bon et donne de l’emphase aux passages heavy. En fin de set, les musiciens remercient discrètement le public par gestes, mais sans un mot, et pas d’au revoir. C’est tendance.

Les papys du doom, Pentagram, sont toujours dans le circuit. Et Bobby Liebling, toujours pareil à lui-même. Apparemment en forme, il bouge bien, le petit vieillard. Il a 346 ans et vient d’un autre monde. Avec ses mimiques improbables, serait-ce Mr. Doom en personne ? Les titres enlevés et plus doom se succèdent, rehaussés par la frappe puissante du costaud batteur «Minnesota » Pete Campbell. Liebling enchaîne les grimaces et autres gestes stupides pour divertir la galerie et les photographes amateurs pendant les parties instrumentales.

Avec Mercyful Fate, on ne rigole plus. Les idoles de Lars Ulrich, qui se produira juste après avec Metallica, mettent le paquet. Plus théâtral que jamais (voyez notre galerie), King Diamond épate et nous livre en pâture un titre destiné au futur album : The Jackal of Salzburg, qui montre un côté légèrement doom qui diffère quelque peu de ce à quoi le groupe nous a toujours habitués. La compo est non finalisée, dixit Diamond, mais donne une idée plutôt positive de ce qui nous attend. Pour le reste, que des classiques issus des deux premiers albums, Melissa et Don’t Break the Oath. Bref, bonheur total !

Metallica pour finir cette édition 2022 du Hellfest en beauté. Tout comme pour les Guns N’Roses, se frayer un chemin vers la scène est compliqué mais ici, tant pis, on y va coûte que coûte. The Ecstasy of Gold, le célèbre thème d’Ennio Morricone, annonce comme de coutume l’arrivée des Four Horsemen, qui démarrent sur les chapeaux de roues avec Whiplash, suivi de Creeping Death, excusez du peu ! C’est au terme de ce morceau que nous arrivons enfin suffisamment près de la scène pour jouir pleinement du spectacle. Ouf, car voici Enter Sandman. James Hetfield demande ensuite : « Qu’allons-nous jouer, maintenant ? On a déjà joué le meilleur ! ». Et d’enchaîner avec Harvester of Sorrow. La setlist pioche d’ailleurs allègrement dans les vieux titres. C’est un James Hetfield posé et humain qui s’adresse au public à plusieurs reprises, n’hésitant pas à évoquer les fêlures et ses démons, comme pour tenter de les exorciser. Touchant. Seek & Destroy juste avant les rappels composés de Damage Inc., One et ses effets pyrotechniques bluffants et enfin Master of Puppets. Bravo à Metallica et bravo au Hellfest pour cette double édition mémorable, qui se clôture par un superbe feu d’artifice de près d’un quart d’heure, au son d’Iron Maiden, AC/DC et Black Sabbath. Merci et à l’année prochaine !

Tyler Bryant and the Shakedown

Thunder

The Ruins of Beverast

UFO

Steve Vai

Whitesnake

Helloween

Crisix

Fractal Universe

Okkultokrati

Stöner

Blues Pills

Opium du Peuple

Pogo Car Crash Control

Dragonforce

Ihsahn

Kreator

Ministry

Alice Cooper

Autarkh

Michael Monroe

Ayron Jones

Betraying the Martyrs

Sorcerer

Airbourne

Discharge

Kadavar

Conviction

Angelus Apatrida

Destruction

Mgla

Pentagram

Mercyful Fate