Evile, Equilibrium, Van Canto, Carbonic Fields, Junkwolvz, Doomsday Astronaut, Deimos’ Dawn, S.D.I, Infected Union, Butcher Babies, Crystal Viper
Wacken (DE)
Date 31 juillet 2024
Chroniqueurs Ségolène Cugnod/Oli de Wacken
Photographe Ségolène Cugnod
https://www.wacken.com/en/

En ce mercredi 31 juillet, la W:E:T et la Headbangers Stage ont déjà accueilli, respectivement, Inherited et Etterna, mais en ce qui nous concerne, notre premier et excellent concert sera celui de Crystal Viper, à midi pétantes, sur la Louder Stage. En effet, d’une part, il n’y a rien de mieux que du bon heavy metal traditionnel pour entamer les quatre jours de festivités que nous offre l’institution qu’est le Wacken Open Air, dont le penchant old school, bien qu’il tende à s’estomper légèrement, demeure une composante importante et appréciée par les hordes métalliques du monde entier, qui, chaque année, rejoignent le grand pèlerinage vers le Holy Ground. D’autre part, quand ce metal est servi par Crystal Viper, il n’y a aucune raison de bouder son plaisir. Marta Gabriel (chant/basse), avec son jeu de scène enjoué et spontané, transpire la passion, et son sourire inamovible ne me contredira pas. Cette apparition est aussi, pour Marta et son groupe, de présenter l’album The Silver Key, sorti quelques semaines auparavant. Une heure de concert, voilà qui paraît long pour un début de journée, mais qui passe à une vitesse folle. [Oli]

Le début de cette première journée se poursuit avec Butcher Babies sur la Louder Stage, visiblement très attendu par des spectateurs aux aguets. Voir le groupe américain performer sur scène constitue plutôt une curiosité pour nous qui le connaissons très peu, d’autant que ce concert suit encore d’assez près le départ de Carla Harvey. Sans grande surprise, sa consœur Heidi Shepherd a tôt de fait de montrer qu’elle a largement les épaules pour mener la barque seule. Si le style groove/metalcore du groupe n’accroche pas nos tympans, il a au moins le mérite de prouver son efficacité sur une certaine frange de l’audience, celle à qui il est directement adressé. Au moment de quitter le pit, la chanteuse remercie les photographes, petite attention bien appréciable. [Ségolène]

Après cela vient le temps de partir, moi en premier, en direction de la Wasteland Stage pour une série de découvertes qui commence avec les Allemands d’Infected Union. Le moins que je puisse dire, c’est que cela démarre sur les chapeaux de roue ! Le groupe officie dans un thrash metal à la sauce germanique, autrement dit, rapide, nerveux et qui adopte une touche heavy ma foi fort agréable à l’oreille, entre autres dans les leads multiples et virtuoses que se partagent Philipp Schuchart et le frontman Christoph Linke. « Rain or shine, I guess it’s « shine » this year! » commente ce dernier, sourire aux lèvres, entre deux morceaux. L’humeur générale est en effet à l’image de la météo du jour, c’est-à-dire radieuse ; parfait pour s’immerger dans l’ambiance et profiter d’un show aussi généreux que dynamique ! Histoire de démontrer qu’il possède le sens du spectacle, le groupe possède sa propre mascotte en la personne d’un démon cornu géant qui se promène sur la scène et adresse de respectueux saluts au public de ses grandes mains griffues — lorsqu’il ne les pose pas sur l’épaule des musiciens. Hail thrash metal! [Ségolène]

Toujours sur la Wasteland Stage vient le tour de S.D.I. de s’adonner, lui aussi, aux joies du thrash metal, mâtiné de speed, cependant. La discographie du groupe ne se compose que de trois albums, tous produits dans les années 80, auxquels s’ajoute, de manière anecdotique, un petit dernier, 80’s Metal Band, paru en 2020. S.D.I. n’a jamais fait beaucoup parler de lui, et sa musique n’est pas renversante, mais ce groupe d’Osnabrück, qui joue pour ainsi dire à domicile, dans lequel ne subsiste aujourd’hui que Reinhard Kruse (chant/basse) comme membre d’origine, est pour moi une madeleine de Proust, tout comme son premier album éponyme, Satans Defloration Incorporated. Ça ne mange pas de pain et ce fut un bon moment. [Oli]

Par la suite, la curiosité me pousse à m’attarder encore un peu devant la Wasteland Stage, le temps de découvrir Deimos’ Dawn, un autre groupe allemand de thrash metal. Une nouvelle fois, le reste du public et moi-même avons affaire à quatre musiciens très impliqués et passionnés, qui affichent fièrement leurs influences sur leurs T-shirts et livrent une performance carrée et très aboutie, cependant un peu trop classique pour être réellement accrocheuse et me pousser à rester plus que le temps de quelques morceaux avant de partir vers Bullhead City. [Ségolène]

Durant les deux premiers jours du festival, les scènes voisines l’une de l’autre W:E:T et Headbangers accueillent les groupes ayant remporté la Wacken Metal Battle à travers le monde ; l’occasion, pour eux, de se faire connaître en vingt minutes, pour nous, de démontrer un élan patriotique en allant saluer les gagnants de nos pays respectifs et de faire quelques découvertes au passage. La première d’entre elles sera Doomsday Astronaut, lauréat de la WMB en Roumanie. Le groupe pratique un metal progressif et mélodique instrumental ; un genre peu calibré pour le grand public de prime abord, qu’il réussit pourtant à rendre accessible. Ceci, grâce à des compositions accrocheuses à l’écriture et à l’exécution aux petits oignons, servies par la maîtrise impeccable dont font montre tous les musiciens et dont ces derniers tirent leur plus grande force en tant que quatuor. À ce niveau, une mention spéciale revient au batteur Victor Bodea, qui inspire le respect du haut de ses 17 ans. Qui plus est, bien que Doomsday Astronaut a fait le choix de se passer de chant, son meneur Waqas Ahmed n’en joue pas moins son rôle de frontman, là aussi à la perfection, s’adressant à son public autant au micro entre deux morceaux que pendant, au travers d’expressions qui en disent bien plus long que des mots… [Ségolène]

Junkwolvz succède sur la Headbangers Stage pour représenter la Grèce. Le groupe, bien que jeune, pratique pourtant un style tout droit sorti des années 80, aussi bien sur le plan musical, axé sur un heavy metal aux accents de l’époque, que vestimentaire, fait de jeans destroy et de T-shirts de groupes tels Megadeth et Guns’n’Roses, jusqu’à la petite touche de kitsch des extensions capillaires bleu électrique du bassiste. Du haut de leur toute jeune expérience, les quatre musiciens rendent un hommage diablement efficace à cette période, auquel le public réserve un accueil enthousiaste et chaleureux. Histoire d’en rajouter une couche de kitsch volontaire, Junkwolvz possède sa propre mascotte qui accompagne les membres sur scène, en la personne d’un homme portant un masque de lion ; si cette petite folie en amusera sans doute certains, sa présence en reste tout de même superflue. Passé outre ce détail, Junkwolvz livre une très sympathique performance qui montre un joli potentiel. [Ségolène]

Après ces deux belles découvertes venues de l’est de l’Europe, vient enfin le moment pour mes compatriotes français de Carbonic Fields de fouler les planches de la W:E:T Stage. Moi qui ai assisté à la prestation leur ayant offert la victoire de la WMB en France, je sais qu’attendre de la part du groupe normand. Les spectateurs non avertis, de leur côté, semblent bien apprécier la découverte de ce quintet au style musical très moderne et original, mêlant prog, thrash, groove et quelques éléments indus dans un joyeux melting-pot soigneusement épicé, et arborant un look excentrique allant de pair avec la musique, aux influences steampunk dans les costumes et le maquillage et des cravates rouges en guise de signature — que le soleil de la fin d’après-midi fait briller de mille feux ! Flamboyant également que le frontman aux allures de professeur fou Thomas D’Herbonnez, qui ponctue sa performance de petites danses et tombe d’abord les lunettes de soleil, puis le chapeau haut-de-forme. Pour ma part, j’apprécie particulièrement le jeu de basse, rapide et proche de celui d’une guitare. Bien joué Carbonic Fields, bien joué la France ! [Ségolène]

La suite de la soirée se déroule pour moi au Wackinger Village, hôte entre autres de stands d’artisanats et de la Wackinger Stage, sur laquelle va bientôt se produire Van Canto. De par son style a cappella metal, le groupe se positionne en figure de proue parmi les groupes que l’on peut qualifier de « curiosités » à voir sur scène, ne serait-ce que pour comparer avec le rendu en studio. Sur ce point, les six chanteurs ne tardent pas à montrer qu’ils savent s’y prendre pour faire illusion, le plus impressionnant étant la capacité dont font montre Ross Thompson et Stefan Schmidt à imiter le son d’une guitare lead ou de la wah-wah. La setlist est constituée, pour une grosse moitié de compositions originales du groupe, celles-ci étant regroupées au début du set, pour l’autre moitié de reprises. Tout comme sur les albums, les premières ne sont pas les plus marquantes, très classiques dans leur structure et leur thématique ; cependant leur aspect hymnesque suffit à créer une ambiance très « feel-good ». En cela, la cohésion et l’esprit d’unité qui se dégage des sept membres du groupe, batteur compris, aide beaucoup. En vérité, de par son concept, Van Canto brille davantage par ses revisites de morceaux emblématiques, plus diversifiées dans les styles et ancrées dans les esprits. Parmi elles, le groupe fait les choix qui s’imposent, entre autres Wishmaster, une des premières à l’avoir fait connaître — et l’occasion pour Inga Scharf de se tromper dans les paroles, non sans amusement — ou, sur la fin, Master of Puppets et Fear of the Dark, que le public reprend avec les chanteurs. En somme, Van Canto remplit son cahier des charges de « groupe à gimmick », sans en faire trop, et donne au public ce qu’il attend. [Ségolène]

Une heure plus tard, le temps d’effectuer une petite balade dans les allées du Wackinger Village et de shooter une des performances pyrotechniques du Flameous Fireshow, me voilà de retour dans le pit de la Wackinger Stage, parée pour le set d’Equilibrium. Sur fond d’un public déjà au taquet qui le réclame à grands cris, le groupe fait son entrée sur fond d’éclairage en néons et de l’intro de Shelter, morceau ayant fait office de présentation du nouveau chanteur Fabian Getto. Dès ce premier titre fait pour lui ainsi que le suivant, l’hymne Renegades – A Lost Generation, le jeune frontman montre une excellente forme vocale et physique et met le feu partout, aussi bien par sa performance qu’en agitant sa flamboyante chevelure d’un côté et de l’autre de l’espace scénique ! Entre deux titres, il prend le temps de remercier en anglais les festivaliers étrangers d’être venus avant d’enchaîner sur la suite ; une suite à la hauteur du début. Dans l’ensemble, le set est un sans-faute : aucune baisse de rythme ne vient le ternir et les morceaux, des extraits d’Armageddon aux récents singles tels Revolution et One Folk nous rentrent dans le lard, en passant par le classique des classiques Blut im Auge, comme il faut. En cela, ils sont on ne peut mieux servis par trois musiciens et un chanteur à l’interprétation et à l’implication solides et sans faille, Fabian Getto en tête. Du haut de sa courte expérience avec le groupe, le jeune homme porte facilement les deux tiers du show à lui seul et prouve qu’avec lui, Equilibrium a fait le bon choix. Autre bon point que le son, géré avec soin jusqu’à en faire oublier l’absence de bassiste ; le sort fait que Martin Skar Berger officialisera son départ du groupe quelques jours plus tard. En quelques mots, Equilibrium donne ce soir un des tout meilleurs concerts de ce premier jour de Wacken — et du fest dans son ensemble —, un véritable spectacle dont je regrette de ne pas pouvoir capturer tous les grands moments — nombreux ! [Ségolène]

Pour terminer en beauté cette première journée, Evile enflamme la Wasteland Stage. Si son thrash metal ne brille pas par son originalité, il gagne furieusement en intensité en live, et quelques riffs à décorner les boeufs produisent un effet immédiat. Les pits ne s’apaiseront qu’à l’extinction des feux ! [Oli]

Les concerts préférés de Ségolène : Crystal Viper, Infected Union, Equilibrium

Les concerts préférés d’Oli : Crystal Viper, S.D.I., Evile