Oranssi Pazuzu
Muuntautuja
Genre black metal psychédélique
Pays Finlande
Label Nuclear Blast
Date de sortie 11/10/2024

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En dix-sept années de carrière, Oranssi Pazuzu a su faire évoluer constamment sa musique, passant d’un black metal qui, dès les débuts, sortait déjà de l’ordinaire, pour arriver à un style profondément original de black metal psychédélique que je qualifierai de progressif. En tout cas, le temps mis par le groupe pour peaufiner Muuntautuja, qui marque le retour d’Oranssi Pazuzu quatre ans après Mestarin Kynsi, leur précédent et remarquable opus, se justifie pleinement car la musique de notre dieu — ou démon, c’est selon — orange progresse encore plus en dehors des sentiers battus et nous offre une oeuvre digne du monolithe noir de 2001 Space Odyssey : on ne sait pas exactement de quoi il s’agit, mais c’est fascinant !

À l’image des volutes de fumée noire illustrant le visuel de l’album, réalisé par Jenna Haapaharju, les titres s’enchaînent en un tourbillon de rythmes et de bruits en constante mutation. Comme quoi ce n’est pas pour rien si l’album s’intitule Muuntautuja, qui signifie « métamorphe » en finnois ! On se laisse entraîner par l’atmosphère sombre et envoûtante des morceaux où se mêlent, autour de la combinaison chant-guitare-basse-batterie, une multitude d’effets allant des bruits industriels ou électroniques aux nappes de piano. Le chant de Jun-Hiss, alternativement clair, growl ou carrément murmuré, est toujours aussi puissant et efficace.

Dès Bioalkemist, premier titre de l’album évoquant le contrôle des idées et les manipulations de masse, le groupe plonge ses auditeurs dans une ambiance lourde, martelée par des sons de machinerie. La suite est à l’avenant, puisque se succéderont des titres d’un magnétisme obscur, tour à tour violents ou plus calmes, mais toujours malsains, tels Hautatuuli et son rythme de valse déjantée, Valotus, qui donne l’impression de traverser une salle des machines en folie, ou Ikikaarme, avec ses arpèges de piano et sa batterie presque jazzy en intro qui va se transformer en une boule de violence qui va elle-même s’estomper et disparaître dans le silence. Enfin, Muuntautuja se clôt sur Vierivä Usva, instrumental lugubre entièrement interprété au synthétiseur.

Alors que le black metal paraît à l’heure actuelle bien sclérosé, avec des groupes se contentant de ressasser la même formule, Oranssi Pazuzu parvient à faire évoluer le genre et à traduire la noirceur profonde de l’univers qui nous entoure.

J’ajouterai qu’à défaut d’avoir pu assister aux prestations live du groupe, Muutautuja est pour moi une bande-son parfaite pour la lecture des superbes adaptations mangas des récits de Lovecraft par Gou Tanabe.