Bonjour, et merci beaucoup de répondre à nos questions sur tes projets ! Pour commencer, une question que beaucoup doivent se poser : quelle est l’origine de cet étrange nom, Sven Mor ?
J’ai tout de suite imaginé l’univers de ce projet teinté d’eau et de vent. Le chant mystérieux du plongeon huard, qu’on peut entendre par exemple dans le morceau Yulunga (Spirit Dance) de Dead Can Dance, m’a inspiré. Il y avait cet oiseau, l’idée d’immersion dans les profondeurs, avec le terme immergo qu’on retrouve dans le nom latin du plongeon huard, gavia immer… Finalement, mes origines bretonnes m’ont fait tourner autour de Evn Mor (oiseau marin), qui a fini en Sven Mor, qui s’apparentait alors à un patronyme intéressant, rappelant aussi l’origine nordique du black metal. Je m’y suis tout de suite senti une réelle appartenance, comme un alter ego, une identité complétée avec laquelle je devais désormais vivre.
Comment s’est passée ton entrée dans le milieu black metal, qui est encore récente ?
Le black metal s’est fait entendre à mes oreilles à travers le mur de la chambre de mon grand frère, au début des années 2000. C’était pour moi un son blanc comparable à celui d’un aspirateur poussé à fond. Ça ne me parlait pas, bien qu’à cette époque certains sons plus ou moins extrêmes pouvaient me plaire, avec le neo-punk, le hard, ou des formes de jazz, comme John Zorn avec Naked City, par exemple.
En 2020, avec le confinement, j’ai repris la guitare classique. J’aime cette introspection, seul avec l’instrument acoustique. Je ne sais plus comment c’est arrivé, mais il y a eu certaines chaînes YouTube d’analyses et de recommandations de musiques metal. C’était un nouveau champ d’exploration pour moi. Tout s’est enchaîné, j’ai adoré toutes ces découvertes en metal progressif (Haken, Pyramid Theorem), tous ces groupes cultes que je ne connaissais pas encore (Iron Maiden, Saxon, Accept, etc.)… Puis le black a fait résonner ma fibre mélancolique et poétique, le côté sombre et marginal de l’être. Cette musique m’a donné les ailes pour me lancer enfin dans la composition. C’était aussi une belle façon pour moi d’écrire de nouveaux textes, de nouveaux poèmes, et de leur donner un cadre musical approprié.
Noël 2020 était l’occasion d’acheter une guitare électrique et une folk, d’apprendre les rudiments de la programmation, des logiciels de son, et c’était parti avec les premiers riffs et cette mise en place progressive où le morceau apparait… C’était comme une magie !
Dans la même lignée, pourquoi avoir décidé de sortir un EP si tôt ? Pourquoi ne pas avoir attendu d’assimiler un peu plus d’expérience ?
Je veux me sentir bien avec ma création, pas me sentir parfait, car ça n’arrivera jamais ! J’ai 38 ans et ce que je fais aujourd’hui n’existe pas dans l’attente d’une progression, on verra. Surtout qu’en vrai, le black metal de Sven Mor, ça ne change rien de l’attendre ou pas, ça ne ressemblera jamais à une maîtrise professionnelle. Je suis tellement content d’avoir sorti ce qui était inenvisageable auparavant. Pour moi, c’est dingue d’être parvenu à composer. Je savais aimer la musique de manière profonde mais je savais aussi mes failles et maigres prédispositions en tant que musicien, et ça dès mes premiers pas à la guitare, il y a de ça bientôt vingt ans ! J’adore écouter les débutants, les amateurs, et je trouve que si on est impliqué dans ce qu’on fait, c’est l’essentiel. Chacun mettra le sens qu’il veut donner à la production musicale, à ce qu’est la musique. Je dirais que mon EP, vu comme ça, pourrait apparaître comme le fruit de frustrations, mais je le vis plutôt comme une véritable libération, et j’espère que les auditeurs peuvent l’entendre aussi de cette façon.
Comme je l’ai écrit dans ma chronique, la musique comporte par moments un aspect très 80’s un peu ringard mais assumé. Quelles sont tes influences qui ne relèvent pas du black metal, voire pas du metal tout court ?
J’aime l’esprit progressif, comme l’apparition de moments acoustiques, ou l’aspect dynamique par contrastes. Sans en avoir les capacités théoriques et techniques, j’adore King Crimson, qui alterne froideur apocalyptique et chaleur humaine. Mon groupe de jeunesse c’est les Smashing Pumpkins, et on retrouve aussi ce type de dynamique.
J’aime aussi l’élan romantique ou mélancolique. Étant sensible aux textes, la chanson française fait partie de mon univers : Barbara, Christophe, Dominique A, Daniel Darc…
Je suis aussi un grand amateur de musique classique. Je joue quelques pièces à la guitare, et j’aime l’aspect introspectif de la musique pour luth par exemple, comme Dowland ou Purcell, c’est de la poésie en musique, la solitude y est jouée et chantée comme jamais, dans une grande sobriété.
Les sonorités d’orgue, de clavecin, j’adore, c’est à la fois ancien et tellement cosmique.
En classique, la musique de Shostakovitch m’a toujours parlé, c’est proche du black metal dans l’esprit, selon moi… Sombre, humain, immersif. Entendre la 7e symphonie au premier rang au Théâtre des Champs-Elysées quand j’avais à peine 20 ans, c’était une expérience incroyable !
Polymorphia de Penderecki, de quoi faire pleurer beaucoup de blackeux !
Pour résumer, je reste très curieux, j’aime les belles harmonies autant que des choses très expérimentales, y’a tellement à faire avec le son !
Et pour revenir aux influences, elles sont tout autant musicales qu’hors champ de la musique. Les sensations, les couleurs, les états d’âme, les paysages, les rencontres, la littérature, sont autant de moteurs d’univers, qui peuvent trouver leur façonnement en musique.
Comme je l’ai aussi écrit dans ma chronique, ce qui marque chez Sven Mor, ce sont les textes : leur sens semble difficilement saisissable par tout autre que son auteur, à tel point que j’en suis venue à me demander ce que tu mettais dans ton thé… Comment conçois-tu l’écriture de tes textes et quel sens veux-tu leur donner ?
(rires) L’écriture m’accompagne toujours, c’est la dimension la plus vaste et la plus étrange que je connaisse. Pour ce projet, les textes venaient avec les thèmes et les couleurs de la musique. Je voyais chaque morceau comme un tout, avec son histoire. Le texte en donne l’aperçu, la fenêtre par laquelle la musique est humanisée et poétisée.
Le chant du huard m’est apparu comme le repli d’un homme dans sa chambre sombre, la bouteille son océan, son ivresse les vagues, la lueur de sa lampe de chevet la lune… Un tumulte intérieur à la fois immobile et puissant, pitoyable et guerrier. La lutte pour la mort et la vie, la naissance, la résurrection. Est-ce le suicide ou le saut de l’espoir ?
Sur les algues conte la promenade solitaire sur les rochers, en bas des falaises, où les illusions sont propices… On aperçoit cette créature, ratatinée, qui ne pourrait être qu’un tas d’algues brunes… C’est l’évocation de notre miroir, notre monstruosité touchante, répugnante, rejetée, mais qui peut aussi être notre gentillesse méprisée par nous-même, qu’on a laissé pourrir. Ce morceau me tient à coeur pour l’ambigüité entretenue avec nous-même et les autres, c’est la question de l’altérité. Qu’est-ce qu’on leur veut, finalement, aux autres, et à nous-même, on se veut quoi ?
L’épopée des monstres, tu en parles bien dans ta chronique, c’est une apocalypse où les monstres ont leur place et où l’humanité est représentée par un couple au fond d’un puits, contemplant les rougeurs d’un ciel flamboyant. Leurs sentiments me semblent aussi beaux et aussi fragiles que ce spectacle et cette terre dévastée.
Dernière couleur d’un monde vivant raconte le rejet d’une certaine vitalité dans notre monde, de la sensualité et des attitudes spontanées, à travers une femme vampire qu’on enferme dans un cachot. Des hommes la privent parce qu’ils sont lâches et effrayés. Je voyais vraiment l’aspect fantastique et l’univers de vieux châteaux gothiques pour ce morceau. C’est un hymne à la littérature fantastique et un questionnement sur l’animalité de l’humain.
Il y a aussi beaucoup de références au féminin ! Que penses-tu de ce sujet en tant que source d’inspiration ?
Aborder la question du féminin et du masculin est complexe, car ça cadre les deux notions dans des registres de conventions ou d’habitudes sociales. Je ne rattache pas la sensualité à la femme ou l’homme, mais plutôt à un mouvement, une dynamique. Je pense que pour quelqu’un de sexe masculin, avoir ce qu’on appelle une part de féminité est simplement une liberté, une écoute de son corps sans rester prisonnier de son image. C’est ce qui m’anime, s’exprimer sans censurer les différents éléments qui nous composent. Donc par rapport à la façon dont on range, dont on classe les choses dans notre société, si on ne se censure pas, on sera évidemment autant féminin que masculin. Si on persiste à vouloir contrôler son image selon ces critères, on devient juste sociopathe.
Pour mes textes, oui, je pense que c’est à teneur poétique, sensorielle et pourquoi pas sensuelle et érotique. Dernière couleur d’un monde vivant (ndlr : le morceau) parle effectivement plus précisément du cadre féminin comme je l’explique dans ma réponse précédente. Mais ce rapport à l’animalité nous concerne tous, c’est universel.
Mais tu as raison, les autres morceaux renvoient également à l’altérité, nos conditions ainsi que la notion de « créature », qui peut avoir sa dimension et son image féminines.
Sven Mor est aussi une affaire très familiale puisque tu collabores énormément avec tes proches. Y a-t-il d’autres personnes avec qui tu souhaiterais collaborer, pour un morceau ou autre chose (visuel, merchandising, etc.) ?
Effectivement, Sven Mor est un one-man-band qui aime impliquer son entourage ! C’est une ouverture esthétique et musicale. Anne-Claire Thévenot est une amie artiste à l’univers chimérique incroyable, elle a découvert l’univers du black metal au moment où je lui ai proposé de faire le logo ! Joshua Hudes, qui a mixé l’EP, est de l’univers punk hardcore et a montré beaucoup d’enthousiasme et s’est fortement impliqué.
Il y a bien entendu Le PISOQ (il veut qu’on l’appelle maintenant Le PISOQ et pas simplement PISOQ), mon frère, qui est en revanche un amateur de black depuis longtemps. En plus de la flûte et d’une participation à un texte, il a apporté son regard et surtout son soutien permanent au projet.
Mon ami graphiste, Klyn Aiden, lui aussi musicien, prend plaisir à découvrir cet univers en m’aidant à organiser les artworks.
Pour mes projets de collaborations, je travaille à poser un texte sur un single de mes ténèbres (ndlr : le nom ne prend pas de majuscules), Annihilation de l’espace par la destruction de l’intimité de la vie. Un texte aussi très nébuleux et étrange que je suis impatient de présenter !
Je connais des amis musiciens, notamment un accordéoniste, Michel Pennec. Si je pouvais avoir sa participation sur un morceau, j’en serais vraiment heureux et honoré. C’est un superbe artiste, jouant de l’accordéon traditionnel, musette, mais étant capable d’accompagner n’importe qui avec beaucoup de sensibilité et de personnalité. L’accordéon a ce pouvoir d’atmosphère puissant, c’est comme un petit orgue !
Nathan Mozes, un excellent guitariste, a commencé à composer un morceau black dans le but que j’y pose ma voix. Ce ne serait sans doute pas du Sven Mor, mais un autre projet. Pour le coup, il a un niveau professionnel qui me met au défi de devoir être à la hauteur alors que je ne me sens absolument pas chanteur. Quand c’est avec Sven Mor, c’est une cohérence personnelle, tout me semble naturel avec les défauts qui vont avec. Avec Nathan, notre amitié donne un cadre de confiance et je ferai tout pour que ça sonne avec autant de qualité que la partie instrumentale qu’il a préparée !
Je suis vraiment content de voir que ce projet Sven Mor, d’abord très solitaire, a pu générer autant de liens entre professionnels et amateurs, sans barrières, avec beaucoup de passion et de respect pour l’art de chacun.
De la même façon, envisages-tu de collaborer avec d’autres musiciens pour faire des scènes ?
Ne me sentant pas forcément légitime en tant que pur musicien, je ne suis pas sûr de pouvoir donner une prestation scénique digne de ce nom. Surtout que j’ai une très mauvaise mémoire concernant ce que je compose, que ce soit les textes ou la musique. La guitare et les programmations ont été un outil passionnant au moment de la composition, mais ça a pu arriver qu’un riff utilisé n’ait été joué finalement que deux ou trois fois, dans l’intérêt de la composition, et quasiment oublié le lendemain. Tout est noté et il serait possible avec des musiciens de créer du live, ou alors que je me remémore bien les riffs et que je propose quelque chose en solo, acoustique ou électrique, guitare et chant, pourquoi pas en mode un peu « chanson française avec screams » ! Il me faut peut-être simplement de la pratique, et me faire à l’idée que ça peut intéresser des musiciens de jouer mes morceaux… mais je me sens encore un peu trop seul dans mon délire pour le prétendre.
J’ai seulement deux récentes expériences de live : c’est près du feu sur la plage auprès d’amis, en impro et cris… et en impro avec Nathan Mozes lors d’un de ses concerts, dont il existe des extraits sur les réseaux ou sur la chaîne YouTube.
À propos de ta chaîne YouTube, on y trouve pas mal de vidéos au montage et aux effets qui font plutôt cheap. Est-ce volontaire ?
Haha, oui, disons que je fais ce que je peux… et ce que je veux, je reconnais ! Ça ne me dérange pas d’avoir des limites techniques, on ne peut pas avoir toutes les compétences du monde, mais on peut rester créatif et prendre plaisir à faire les choses. Pour moi c’est très important de ne pas hésiter, surtout si ça nous passionne, de dessiner, faire de la musique, construire son univers… Je ne fais pas non plus du kitsch pour faire du kitsch, je m’en aperçois durant la conception ou au résultat, ça me fait même souvent sourire… Je me souviens avoir eu une certaine satisfaction avec l’inclusion d’un GIF de vaches dans les prés au son de mon impro de guitare classique.
Certaines de ces petites vidéos, appelées Improvisations haiku black metal, ont l’intérêt de l’ensemble : poèmes écrits, impro musicale sans retouche, images… Tout est créé d’un seul élan : l’impro, j’écoute ensuite en écrivant un poème, puis j’y mets les images. Ça n’a la prétention de valoir quelque chose qu’en tant qu’expression personnelle à partager. Je me dévoile et les défauts vont avec.
Personnellement, pour les textes qui y sont écrits et pour l’aspect fragile de l’improvisation, je tiens beaucoup à ces petites vidéos !
En effet, ça prête à sourire de voir une image changer de couleur pour virer au rose ou des mots apparaître en bas de l’écran de manière hasardeuse… On a parlé du projet Sven Mor, de Dernière couleur d’un monde vivant, maintenant parlons un peu de Huard Productions ! Comment t’est venue l’idée de fonder ce label, et comment décrirais-tu sa ligne directrice ?
Huard Productions est né avec la sortie de la cassette de l’EP de Sven Mor, en ayant en tête de pouvoir éventuellement y inclure d’autres projets pour des sorties cassettes, ayant pris plaisir dans le processus de production. C’est aussi le fruit de rencontres. Comme avec mes ténèbres (dark ambient), qui n’avait pas de sortie physique prévue. Une cassette d’Arsule (dungeon synth) est prévue aussi, ainsi que de Nathan Mozes (psychedelic ambient rock) et de Etat limite (black metal). Pour ce dernier, à sa demande, ce sera un CD, que nous envisageons de sortir avec la collaboration de France, Black, Death, Grind, page et blog tenus par des passionnés de musiques extrêmes qui font beaucoup pour la mise en lumière des jeunes projets comme des plus anciens.
C’est une ligne directrice naturelle, je fonctionne aux rencontres et à l’approche de chacun. Chaque façon de produire sera différente selon l’artiste. Je ne suis pas une entreprise, c’est avant tout le plaisir des rencontres et de l’échange dans la passion musicale. N’ayant pas de références dans le milieu de la production, on peut faire sans règles établies, à l’écoute de chaque artiste et selon les besoins, les envies et les moyens de chacun.
Artistiquement, je vois que ce qui se profile, c’est la présence de projets personnels, souvent très marqués par la vie et l’intimité de chaque artiste. Il y a une dimension fortement poétique, quelque chose de l’ordre de collaborations entre des personnes solitaires, complexes, mais qui ont une approche humaine… disons, attentive, profonde… et avec un brin de folie, il faut le reconnaitre !
Comment as-tu découvert les artistes qui ont récemment intégré les rangs du label ?
Pour mes ténèbres, je l’ai contacté pour une collaboration, avec l’envie de dire des textes sur sa musique. Il est Polonais mais a une histoire liée à la France et la Belgique, nous échangeons donc en français. Il est un grand introverti assumé, sa musique mérite vraiment d’être écoutée. Sa personnalité et son univers musical sont très singuliers.
Arsule est aussi une très belle rencontre. Nous nous sommes retrouvés sur un certain sentiment de malaise face à la façon dont certains groupes et certains fans s’appuient sur la musique pour générer du communautarisme identitaire, racialiste et souvent un peu trop fiers de leurs racines, en passant par le mépris des cultures qui ne sont pas les leurs… toujours facile de considérer être né dans le bon camp ! Sans parler du masculinisme des plus affligeants qui va souvent avec. Arsule a un univers très complet : elle dessine, écrit, compose, dans un univers très onirique, sensoriel et légendaire. Elle m’a fait me plonger dans le dungeon synth, que je connaissais mal.
Nathan Mozes est le seul que je connaissais avant mon entrée dans l’univers du black metal. Je le voyais pour des concerts dans des bistrots de mon quartier. C’est un guitariste que j’admire beaucoup, son jeu est exceptionnel. Il utilise très peu l’ordinateur pour composer, il a une approche vraiment concrète qui me parle. Il était alors vraiment partant pour faire une cassette, lui qui a enregistré souvent sur 4 pistes cassette !
Le dernier venu est État limite. Son nom est emprunté à sa maladie borderline diagnostiquée, qui est une difficulté et une souffrance quotidienne et qu’il a souhaité exprimer au travers de ce premier album de black metal. Ce sont les gars de France, Black, Death, Grind, Cyrille et Yann, qui me l’ont recommandé pour voir si nous pouvions collaborer pour le sortir en CD… ce qui est en cours ! Thibault a un univers profond, conscient des affres de la condition humaine. J’aime beaucoup échanger avec lui sur son processus artistique et sur les thèmes abordés dans son album, qui est vraiment super prometteur !
Accessoirement, pourquoi adopter le format cassette en plus du format numérique ? Sachant que ce matériau semble un peu dépassé et que beaucoup de gens ne possèdent pas de lecteur cassette…
La cassette est un format que j’ai réinvesti à titre personnel quand je me suis mis au black, style dans lequel beaucoup d’artistes produisent encore en cassette. J’ai un poste cassette des années 80 dans la cuisine, et j’adore le son. Tout me plaît dans les cassettes : le format, le plaisir à manipuler, le son et ce qu’on peut trouver. Quand j’achète un lot d’occasion, je ne sais parfois pas ce qu’il y a dedans. Ça va des compilations de slows aux reprises à l’identique de morceaux par des interprètes inconnus, aux artistes les plus underground du noise… Avec le numérique, il faut un peu savoir ce qu’on veut écouter, t’as pas un objet qui te tombe dans les mains par hasard ou qui est le fruit d’un vrai geste, de quelqu’un qui te le donne ou le prête. Ça engage et ça t’implique dans l’écoute. Surtout que la cassette, tu ne t’amuses pas à passer d’une piste à une autre, il faut prendre le temps d’écouter la continuité. Et j’aime aussi parfois que ce soit au milieu de la bande et que ton écoute soit un peu le fruit d’un hasard, là où s’était arrêtée l’écoute précédente…
Et pour finir, la cassette est sur certains labels le seul format distribué. Ça reste par exemple le format physique le plus répandu de la dungeon synth, loin devant tous les autres. Donc je suis loin d’être un original avec mes cassettes ! Mais effectivement, pour une population moins avertie, ça peut sembler un peu hermétique et pas pratique… Mais bon, les gens, de toute façon, se contentent souvent du numérique, alors qu’il y ait une cassette proposée en plus, c’est que du bonus !
Merci beaucoup pour tes réponses ! As-tu quelque chose à ajouter pour les lecteurs ?
Merci beaucoup de m’avoir écouté, l’interview m’a fait très plaisir. Le mot de la fin revient aux artistes. Si je peux oser donner mon avis, je pense qu’avant les plateformes, avant les labels, ce sont les artistes qu’il faut soutenir, c’est eux qui fournissent cette sublime matière musicale qui nous fait vibrer et nous plonge dans de merveilleux univers. Avoir ça en tête dans son expérience d’auditeur, ça me semble important.
Merci et rock on in the dark !