Dream Theater, Leprous, Scorpions, Abbath, Judas Priest, The Ocean, Myles Kennedy, Visions of Atlantis, Tryglav, Audrey Horne
Clisson (FR)
Date 21 juin 2025
Chroniqueurs Emy Ruiz, Jordan Fonvieille, Nelly Lafargue
Photographes Emy Ruiz, Jordan Fonvieille
https://hellfest.fr

En ce troisième jour, l’énergie ne faiblit pas, malgré les températures qui transforment les tentes en fournaises et les allées en déserts d’asphalte. Aujourd’hui, on célèbre la fête de la musique partout en France et… quelle plus belle façon que de la vivre pleinement au Hellfest ? À cet effet, notre équipe s’est encore laissé porter au gré des scènes, entre coups de cœur, légendes plus ou moins vaillantes et gros moment d’injustice pour certains groupes — spoiler alert, on parle de Dream Theater — peu récompensés par la présence du public, malgré des performances magistrales.

 

12 h 15 – Audrey Horne (Main Stage 1)

Réveil idéal pour cette troisième journée avec Audrey Horne, groupe norvégien qui a tout donné sous un cagnard déjà solide. Son hard rock aux relents de Maiden et Van Halen nous a embarqués dès les premières secondes, porté par un chanteur charismatique et des musiciens clairement bien rodés. Le public, présent malgré l’heure, répond avec enthousiasme aux interactions du frontman. Un concert solaire, plein d’énergie positive, avec des solos qui transpirent la passion du riff bien senti, et une très belle entrée en matière.

13 h 35 – Tryglav (Temple)

Tryglav, c’est une efficacité glaciale sous une chaleur de plomb. Le projet solo croate, incarné en live par un line-up masqué et redoutablement en place, a livré un set sans concessions entre black metal mélodique et rythmes martiaux. Porté par des riffs acérés et une batterie chirurgicale, Tryglav a su fédérer les amateurs de noirceur scandinave, même en plein jour. Un mur de son solide, un visuel soigné, et une belle surprise pour ceux qui découvraient le projet en live.

 

 

16 h 00 – Visions of Atlantis (Main Stage 2)

Clémentine Delaunay et ses acolytes font une arrivée théâtrale, voire majestueuse, dans un décor nautique, dont la scénographie repose sur la simplicité et le charisme des membres. Visions of Atlantis offre un rafraîchissement visuel et sonore dans la chaleur poisseuse du festival. La setlist ravit tant les inconditionnels que ceux en quête de découverte, avec Master the Hurricane, Clocks, Legion of the Seas et Armada. Le groupe a clairement capté l’attention, mêlant chants de sirènes et orchestration épique. Un moment presque cinématographique, parfait pour se vider la tête.

16 h 50 – Myles Kennedy (Main Stage 1)

Pour les amateurs de voix célestes et riffs sensibles, Myles Kennedy a offert un set tout en maîtrise, en finesse, et en charisme tranquille. Que ce soit avec Alter Bridge ou en solo, monsieur Bass, de son vrai nom, n’a rien à prouver, et ça se sent. Sommes-nous fans absolus de sa voix ? Oui. Et ce qui se passe sur scène le justifie, où chaque titre résonne comme une preuve vivante de son talent. Le public se montre concentré et conquis, réceptif à une prestation sans accroc pour ce set qui a touché juste.

19 h 10 – NEwTT (Hellstage)

Changement d’ambiance radical avec la festive Hellstage. On va voir NEwTT, groupe toulousain qu’on a eu le plaisir d’interviewer quelques heures auparavant. Sortant de la fournaise surpeuplée des Mainstage et autres scènes du site, le concert a été pour nous une vraie bouffée d’énergie, porté par une présence scénique percutante. Le groupe a su créer une atmosphère à la fois festive et puissante, offrant un moment franchement sympa. Une belle découverte de cette édition, à suivre de près dans les mois à venir.

 

19 h 35 – The Ocean (Altar)

Une partie du public a déserté la Main Stage 2 pour se réunir devant Alter autour de The Ocean : un post-metal océanique, brut et organique, oscillant entre lourdeur abyssale et profondeur contemplative. Nous étions là pour boire les vagues musicales que les Allemands déroulent, et ils ne nous ont pas déçus, grâce à des paysages sonores puissants et une immersion totale dans l’essence même du post-metal.

21 h 50 – Judas Priest (Main Stage 1)

Les dieux du metal Judas Priest foulent à nouveau les planches du Hellfest cette année, et c’est toujours un événement. Rob Halford, désormais véritable icône du heavy, parvient encore à faire frissonner la foule, même si les années pèsent. Le son était globalement bon, la setlist blindée de classiques tels Painkiller, Electric Eye et Breaking the Law, et l’esthétique, qui ne change pas d’un pouce mais qui se veut toujours aussi efficace et old school, a ravi les fans de la première heure. On sent que le groupe en a encore sous le pied, même si la fougue est aujourd’hui tempérée par le poids du temps. Un concert de légende, émouvant à sa manière, avec ce parfum d’adieu flottant dans l’air…

22 h 50 – Abbath (Temple)

On change radicalement de registre avec le black nordique d’Abbath. Déferlante de poigne, blast beats polaires, et un frontman égal à lui-même — l’un des moments les plus viscéraux du samedi. Le show se résume grosso modo à : peu de paillettes, beaucoup de puissance — typique de la scène Temple, quoi ! Le son imparfait renforce la lourdeur du set. Pour les fans du genre ou pour les moins blackeux, Abbath reste un incontournable à voir en live.

23 h 10 – Scorpions (Main Stage 1)

Et là… c’est le drame. C’était déjà le cas en 2022… pas de raison que ça change. L’émotion était palpable pendant Scorpions, mais pas forcément dans le bon sens. Chez Metal Alliance, nous avons beaucoup de respect pour le groupe et sa longévité, ceci dit, force est de constater que Klaus Meine peine de plus en plus, malgré les efforts visibles. Il y a des soirs où l’on aimerait que certains géants raccrochent les gants dignement — surtout ceux qui sont en tournée d’adieu depuis quinze ans. Le concert de ce samedi soir fut peut-être un de ces moments. Le public reste bienveillant, les classiques sont là, mais la magie semble s’effriter.

23 h 55 – Leprous (Altar)

S’il existe bien un groupe dont personne ne sait comment prononcer le nom, il s’agit bien de Leprous. Vous me direz, ce n’est pas bien grave ; le plus important, c’est d’avoir été voir et écouter Leprous. Le groupe livre un set technique et planant, au mapping fidèle à leurs opus récents que sont Atonement, Malina et Aphelion. Guitares élégantes, rythmiques intrigantes, et arrangements progressifs emmènent dans un univers subtil et hypnotique. Public attentif, initiation réussie pour les néophytes.

 

00 h 45 – Dream Theater (Main Stage 1 – clôture)

Et là, la claque. L’uppercut progressif. Dream Theater, géants du metal technique et mélodique, sont venus clore cette journée de samedi avec un show d’une précision chirurgicale, comme eux seuls en ont le secret. On pensait y rester « un peu », malgré l’amour porté à ce groupe depuis Peruvian Skies… on est restés aspirés.

Littéralement. Chaque musicien est au sommet de sa discipline : la basse six cordes de monsieur John Myung est d’une fluidité sans nom, Mike Portnoy affiche un sourire contagieux du haut de son monster, et John Pettruci délivre ses solos avec une évidence presque indécente. Le tout, sans jamais tomber dans la démonstration gratuite. Côté chant, James LaBrie s’en sort très bien, avec une voix bien plus en place qu’attendu — notamment sur les passages plus anciens, pourtant casse-gueule en live.

Nous avons adoré ce concert, vraiment ! Le genre de set qui nous rappelle pourquoi on aime autant ce genre de metal exigeant, alambiqué, parfois perché.

Mais… il y a un « mais », et pas des moindres, indépendant de la volonté du groupe : la zone public de la Main Stage 2 était quasiment vide. Dès le début du concert, on pouvait se faufiler sans difficulté jusqu’au crash barrières. Idem en plein set, idem à la fin. Pour un groupe de cette trempe, c’est presque irréel ! En journée, les Main Stage sont bien plus remplies. Comment expliquer cette désertion du public ? Peut-être par un style trop compliqué d’accès pour un public festivalier de plus en plus large et moins aguerri à ce genre de complexité musicale ? Ou peut-être par la concurrence féroce du moment : Turnstile en Warzone, au style punchy et accrocheur, ou le tribute à Bathory au Temple, qui attirait les curieux et les nostalgiques du black originel.

Quoi qu’il en soit, pour ceux qui étaient présents, ce concert fut un moment suspendu, un final de haute volée, injustement mis de côté, mais totalement assumé. Dream Theater a fermé la scène en maître, fidèle à sa légende.

Si la soirée s’achève sur une note un peu triste, le dernier jour de festival est très prometteur, assez pour recoller notre petit cœur brisé pour Dream Theater avant de rentrer se reposer avant la clôture de l’édition 2025 !