
Site Internet
Quand on a entamé sa carrière avec un album, Les Blessures de l’Âme, qui va devenir l’un des incontournables du black metal français, et que l’on enchaîne, au fil des ans, cinq autres albums toujours intéressants et dont le dernier, La Morsure du Christ, est une incontestable réussite, l’annonce du prochain album de Seth ne peut que susciter l’intérêt du metalleux. Ainsi sort en mai 2024 La France des Maudits, le nouvel LP de Seth. Le line-up du groupe bordelais est inchangé depuis le précédent album et la production de l’album a été ciselée par Francis Caste, au Studio Sainte-Marthe, à Paris.
Derrière un visuel sombre, réalisé par Andy Julia, représentant l’ange de la mort, armé de sa faux, qui veille sur la cour d’un bâtiment du XVIIIème ou XIXème siècle où se dresse une guillotine, on découvre un album tout à fait digne de son prédécesseur. Après La Morsure du Christ, consacrée à la déliquescence de la religion catholique, illustrée par l’incendie de la Cathédrale Notre Dame, La France des Maudits prend pour thème la révolution Française de 1789 — ce n’est pas pour rien si l’album est sorti le 14 juillet, jour de la fête nationale en France — pour aborder en sous-texte celui de la révolte des parias et des laissés pour compte, tant à cette époque que de nos jours. Sans parler de concept album, La France des Maudits est un album particulièrement cohérent, par les thèmes abordés dans les chansons.
Le premier titre, Paris des Maléfices, plante le décor : Paris ; pas la cité des lumières mais le Paris sombre et sanglant de la fin du XVIIIème siècle, où la guillotine fonctionnait à plein régime. Le texte, sous titré Ode à Baudelaire, est effectivement digne de ce grand poète, et c’est un réel plaisir de trouver des textes en français aussi bien écrits, dignes des Fleurs du Mal ou du Spleen de Paris. Le groupe enchaîne sur Et que vive le Diable, qui annonce la couleur avec son riff inspiré : la révolution se fera sous la bannière de Satan !
Après un démarrage mid-tempo, La destruction des reliques illustre avec furie l’assaut des forces du diable. Dans le coeur un poignard est à l’inverse un titre plus intimiste et désespéré, suivi de Marianne, instrumental mélancolique, qui permet de souffler un peu. Répit de courte durée, puisqu’après une intro lente et harmonieuse, Ivre du Sang des Saints relance le tourbillon.
Insurrection, l’avant dernier titre, est un véritable hymne à la révolte avec son refrain appelant à marcher sur le monde aux côtés de Satan. Enfin, l’album se clôt avec Le vin du condamné, qui semble pourtant conclure à l’échec de la révolution, même si la volonté de rébellion persiste.
Le black metal de Seth est de haute tenue, à des années lumières du black des origines enregistré sur une cassette au fond d’une cave et distribué sous le manteau. Le chant de St Vincent est toujours aussi envoûtant de noirceur. Les guitares sont omniprésentes et les choeurs, piano et autres effets sont dosés avec ce qu’il faut de précision pour ne jamais être envahissants mais, bien au contraire, pour apporter aux titres le romantisme qui fait l’élégante puissance de Seth, sans s’égarer dans le black metal symphonique.
Pour résumer, La France des Maudits pousse un peu plus le curseur de la sophistication et que, là où La Morsure du Christ vous happait immédiatement, ce nouvel album nécessite une écoute plus approfondie pour en apprécier pleinement toutes les subtilités.