Clegane
White of the Eye
Genre doom/sludge
Pays France
Label Almost Famous
Date de sortie 20/05/2022

Site Internet

Qui dit « dans le blanc des yeux », dit « de façon directe, sans compromis et en allant droit au but ».

C’est en effet l’ambition et la directive que se sont données Laurent, Olivier et Guillaume pour ce nouvel opus. Un album qui fait mouche sans fioritures. Ils nous proposent ici cinq titres teintés de noirceur, d’introversion, de douleur et de la crise du soi. Une parfaite harmonie en symbiose avec le doom. On ne s’attendait à rien de moins, et c’est pour cela que j’affectionne tant ce style musical : une sincérité, une proximité avec l’âme humaine y font figure. Du vrai, quoi, de l’authenticité. Et c’est ce que l’on retrouve sur White of the Eye.

Sur le premier titre, Fractured, on note des paroles vibrantes de frustration, d’une certaine violence et de désarroi :

« Fake, imposture
Fractured pieces of you
Fire, scream for help
Friends stare at the flames »

On semble raconter une histoire, reporter du vécu. On s’adresse à quelqu’un. On illustre des états d’âme turbulents et rageurs. C’est parfait pour ce genre, et on peut facilement faire un parallèle avec nos propres frustrations et malheurs lors de l’écoute, et pourtant nous transporter ailleurs : le poing en l’air dans les concerts, avec la nuque martelant les notes lourdes et les cris de ce désespoir, malgré tout vivant et très énergique.

Le deuxième morceau, Cara Muerte, nous propose une approche différente : c’est un brin plus éthéré avec des sonorités un peu à la My Bloody Valentine (shoegaze 90’s), et cela pour mon plus grand bonheur. Notez que c’est plus lourd, plus pesant et plus souffrant, mais la sonorité s’y apparente bien. Cara Muerte est un pur délice doom. Aussi, pour rester dans les années quatre-vingt-dix, j’y distingue une sonorité grunge (un peu Alice in Chains). Et c’est très bien. Qu’on le veuille ou non, le grunge a permis qu’aujourd’hui, nous ayons le stoner et le doom sous apparat rock. Et quelle intéressante évolution !

On poursuit avec le titre éponyme de l’album. Une intense rage y fulmine. On y retrouve de superbes harmonies vocales féminines et masculines, totalement inattendues, une agréable surprise. Un titre d’une certaine beauté, car la souffrance et la beauté sont si souvent mêlées…

Water and Stone affiche des vocaux sans cris, plus légers et sobres. On y expose un peu une résolution post fracas du ressenti du malheur, et on s’y résigne. C’est plus aéré, le son est parfait. Les voix sont prenantes, alliées aux textes, elles nous transportent au gré du vent. Une résignation en soi.

« Don’t get mad
Feed the stone
Morning rain
Runs on you
I won’t move
Dead & doomed »

Healing in Vain sera le chant du cygne de cet album. L’épilogue. Un peu un dévoilement final en soi. Si cet album est un concept, on pourrait croire que le protagoniste est enfermé dans sa douleur et cloué sur un fauteuil roulant. Une pièce isolée ? Ou une finalité de tout ce ressentiment sur cinq titres ? Je n’en suis pas sûr. Mais c’est comme ceci que je perçois le tout.

Bravo, White of the Eye est un album non-linéaire qui saura plaire autant aux fans de sludge et de doom, qu’aux nostalgiques grunge et amateurs de rock alternatif. On peut tous s’y retrouver d’une manière ou d’une autre. J’ai également pu déceler une influence du groupe Les Discrets, qui donne un peu dans le même genre. Et c’est un beau compliment.

Merci Clegane.